Aurillac: une femme verbalisée pour s'être promenée seins nus, la manifestation de soutien dégénère

Vitrines cassées, tribunal pris pour cible: la petite ville d'Aurillac a connu un samedi agité en marge du festival des Arts de rue. Tout commence mercredi pendant ledit festival qui se tient chaque année dans les rues de la préfecture du Cantal et qui rassemble à chaque édition près de 100.000 personnes. Alors qu'il fait très chaud à Aurillac, Marina, une festivalière, remarque que la plupart des hommes autour d'elle sont torses nus.
Accablée par la chaleur, elle décide de suivre le mouvement et enlève à son tour son t-shirt et se retrouve seins nus. Mais dans la foulée, des policiers lui demandent de remettre son t-shirt et de cacher ses seins. Devant le refus de Marina au nom de l’égalité femme-homme, elle est conduite au commissariat et reçoit une amende pour exhibition sexuelle. Une amende dont le montant n’était pas précisé.
"Police nationale, milice patriarcale"
Ce samedi, une marche de protestation en soutien à Marina était organisée avec comme slogan "Aurillac topless, la police en PLS" ou encore "Libérons nos tétons de vos regards de cochons". En tête du cortège d'environ 1.000 personnes, des femmes seins nus ont scandé des chants féministes et anti-police comme "Police nationale, milice patriarcale".
À l'arrivée devant le tribunal d'Aurillac en fin de cortège, les choses ont un peu dégénéré. Une dizaine de manifestants ont arraché et brûlé des drapeaux français, puis envahi et endommagé le hall du tribunal de la ville. Des vitrines ont été prises pour cible et des murs tagués.
Le maire d’Aurillac a dû intervenir personnellement et a réussi à rétablir le calme en promettant que les poursuites contre Marina allaient être abandonnées. Le ministre de la Justice Eric Dupont-Moretti doit se rendre sur place ce lundi pour apporter son soutien aux magistrats.
Des insultes contre les policiers?
"Chaque année, à l'occasion du festival de théâtre de rue, Aurillac est envahie par une population qui va d'Isabelle Adjani aux punks à chiens", tacle l'agriculteur Didier Giraud dans "Les Grandes Gueules" sur RMC et RMC Story. "Il y a des milliers de punks à chiens, des altermondialistes avec des slogans dégoulinant appelant à la mort de Bernard Arnault", ajoute-t-il, déplorant des festivités militantes.
"J'admire ces femmes qui vont au-delà de cette pudeur", assure aux "Grandes gueules" Laure, festivalière et originaire d'Aurillac, qui tient cependant à rétablir certains faits: "Marina a bien contesté la demande des policiers mais je pense qu'elle les a insultés au passage. Les fonctionnaires lui ont demandé ses papiers, elle ne les avaient pas, elle a donc été emmenée au commissariat", explique-t-elle, évoquant d'ailleurs une manifestation déjà prévue ce samedi pour les droits des femmes et dénoncer le "patriarcat".
Une loi difficile à interpréter
Une question se pose désormais: pourquoi Marina a-t-elle été interpellée et verbalisée, au contraire des festivaliers masculins? La loi n'est pas très claire: l’article 222-32 du code pénal interdit l'exhibition sexuelle imposée à la vue d'autrui, passible d’un an de prison et 15.000 euros d'amende.
Mais le code pénal ne précise pas si les seins sont considérés comme un organe sexuel. C’est là tout le débat.
Résultat: depuis des décennies en France, on peut bronzer seins nus à la plage. Des gendarmes qui avaient demandé à deux femmes de se couvrir sur une plage des Pyrénées-Orientales en 2020 à la demande d’une famille, avaient été désavoués par leur direction. L’affaire était remontée jusqu’au ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, qui avait évoqué une "liberté fondamentale".
On peut donc être seins nus au bord de la mer, d’un lac et d’une rivière. Dans un jardin public ou dans une piscine municipale, c’est généralement interdit, par le règlement. Mais dans l’espace public ou dans la rue, théoriquement, ce n’est pas interdit. Pendant la période estivale, cependant, de nombreuses communes du bord de mer prennent des arrêtés interdisant aux hommes de se balader torses nus.