Éric Dupond-Moretti devant la CJR: "le ministre a vengé l’avocat", estime une magistrate à la barre

La Cour de Justice de la république a entendu les trois magistrats du parquet national financier visés par une enquête administrative ordonnée par Éric Dupond-Moretti depuis la chancellerie en septembre 2020, une des deux procédures reprochées au ministre de la justice pour prise illégale d’intérêts.
"Dans ce dossier le ministre a vengé l’avocat" assène Ulrika Delaunay Weiss "j’ai été visée en tant que magistrate dans l’exercice de mes fonctions au parquet national financier".
La magistrate estime être la cible d'Eric Dupond-Moretti
Éric Dupond-Moretti lève les yeux au ciel, marmonne et se retourne vers ses avocats. La magistrate estime être devenue la cible d’Eric Dupond Moretti à cause de deux dossiers.
Le premier impliquant l’actuel garde des Sceaux comme avocat mis en examen et le deuxième qui enquêtait sur ses fadettes pour identifier la taupe dans une instruction visant Nicolas Sarkozy.
Un mois avant sa nomination Me Dupond-Moretti avait dénoncé les méthodes de barbouze du PNF et avait déposé plainte pour violation de la vie privée. Une plainte qu’il avait retirée à son entrée au gouvernement.
La magistrate explique qu’elle a été un "zombie" au lendemain du communiqué de presse du garde des Sceaux qui annonçait le 18 septembre 2020 l’ouverture d’une enquête administrative la visant elle et deux autres procureurs du parquet national financier révélant leurs noms.
Un scandale polito judiciaire
"Piétinant notre présomption d’innocence" précise-t-elle. Son collègue Patrice Amar dénonce lui aussi un scandale politico judiciaire, "un jeu de rôle entre un quasi-ministre plaignant dans l’affaire rejetant la responsabilité sur un ministre sortant".
La Défense de Eric Dupond-Moretti n’a eu de cesse de rappeler que c’est Nicole Belloubet sa prédécesseur qui avait lancé une enquête de fonctionnement sur le PNF le 1er juillet 2020, le garde des Sceaux n’avait fait que "poursuivre cette procédure".
Mal à l’aise à la barre en tant que simple témoin, Patrice Amar déplore de ne pas avoir le statut de victime. C’est une particularité de la Cour de Justice de la république qui n’étant pas saisie des intérêts civils n’admet pas de constitution de partie civile.
La dernière à témoigner est l’ex cheffe du PNF Eliane Houlette qui se présente à la barre à reculons : "je n’ai pas sollicité ma comparution ici aujourd’hui j’ai tout dit à la commission je n’ai rien à ajouter ou retirer."
Éliane Houlette se livre pourtant à l’exercice de la déclaration liminaire.
"Trois ans après il ne reste rien des accusations très graves et sans fondement lancées par Éric Dupond-Moretti", déclare Éliane Houlette.
Ce parquet a travaillé en toute indépendance dans le strict respect de la loi, il a été injustement attaqué.
Les accusations se sont effondrées devant le Conseil supérieur de la magistrature. "Derrière elle Eric Dupond Moretti perd patience "c’est une honte", bougonne-t-il.
"Cette affaire qui n’aurait jamais dû en être une, poursuit l’ex cheffe du PNF aujourd’hui à la retraite, aurait pu porter une atteinte considérable à l’honneur de ce parquet, et à celui de tous les procureurs de France".
"Fort heureusement cela n’a pas été le cas, il est acquis que le PNF s’est comporté de manière irréprochable. Elle ajoute : "je suis très fière de ce parquet".