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“Le système dysfonctionne et il faut le changer": la Justice responsable du meurtre de Philippine?

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La Justice est-elle en partie responsable du meurtre de Philippine? Le meurtre de la jeune étudiante à Paris alimente les accusations de "dysfonctionnements" de la chaine administrative au regard du profil du principal suspect, soumis à une obligation de quitter le territoire français (OQTF). Pour Béatrice Brugère, secrétaire générale du syndicat Unité magistrats FO, le système dysfonctionne bel et bien et doit subir des changements.

Un crime abominable, qui aurait pu être évité. Le corps de Philippine, une étudiante de 19 ans à l'université de Paris-Dauphine, a été retrouvé enterré dans le bois de Boulogne, dans l'ouest parisien, lors d'une battue samedi après-midi. Une information judiciaire a été ouverte pour homicide et viol ce mercredi 25 septembre.

Un ressortissant marocain a été arrêté mardi dans le canton de Genève, en Suisse. Âgé de 22 ans et en situation irrégulière, le suspect avait été condamné en 2021 pour un viol commis en 2019 et avait été "libéré, en fin de peine, au mois de juin 2024", selon le parquet de Paris. Il n'a pas bénéficié de libération conditionnelle, selon une source judiciaire française, il est sorti à la fin de sa peine, en bénéficiant de réductions automatiques que la loi permettait encore à l'époque de sa condamnation.

Meurtre de Philippine : l'État responsable ? - 25/09
Meurtre de Philippine : l'État responsable ? - 25/09
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Il était sorti de détention le 20 juin et avait été placé en centre de rétention administrative (CRA) à Metz, selon une source proche du dossier. Le 3 septembre, un juge des libertés et de la détention avait validé sa sortie du centre de rétention. Une mesure assortie d'une obligation de pointer. Le 4 septembre, le Maroc avait fait "parvenir l'autorisation d'expulsion" aux autorités françaises, selon cette même source. Mais le suspect était déjà dehors.

"Urgence d'avoir une fluidité totale entre Vendôme et Beauvau"

La veille du meurtre, le 19 septembre, le suspect avait été inscrit au fichier des personnes recherchées, parce qu'il ne respectait pas son obligation de pointer, toujours selon cette source. Alors, à qui la faute? Plusieurs responsables politiques, de droite comme de gauche, ont mis en cause "la chaîne pénale et administrative" dans cette affaire, jugeant que le suspect n'aurait pas dû être libéré avant l'obtention du laissez-passer permettant son expulsion vers le Maroc.

Un avis partagé par Béatrice Brugère, secrétaire générale du syndicat Unité magistrats FO, invitée sur le plateau de RMC ce mercredi. "C’est une affaire épouvantable. Ce n’est pas un drame de plus, mais un drame de trop. Il faut évaluer ce qui ne marche pas dans notre système". Cette dernière explique qu’en France, il est impossible d'expulser un mineur étranger “quand bien même, il a commis des crimes”. Si la loi a changé, il reste du chemin à parcourir: “il faut accélérer les libérations-expulsions", assure Béatrice Brugère.

"On voit avec cette affaire l’urgence d'avoir une fluidité totale entre Vendôme et Beauvau, il faut que ces deux ministères travaillent main dans la main pour éviter tout raté. Il faut revoir le système de l'exécution des peines, ça s'anticipe, ça s'organise. Le ministre de l'Intérieur a raison: il faut modifier la loi". La secrétaire générale du syndicat Unité magistrats FO fait référence aux propos de Bruno Retailleau ce matin, qui a promis une évolution de l’arsenal juridique.

"Je ne crois pas que la justice soit laxiste"

L’invitée d’Apolline de Malherbe récapitule donc: “il y a problème de moyens, de politique pénal, de lois, d'application de la loi. Le système dysfonctionne et il faut le changer".

Pour autant, Béatrice Brugère ne trouve pas la justice laxiste. "Je ne crois pas que la justice soit laxiste, elle fonctionne et condamne et poursuit toutes les infractions qu'elle peut poursuivre. Mais elle est soumise à une injonction contradictoire. Ce qui la rend peut-être, aux yeux des citoyens, laxiste”, conclut-elle.

C.A