Règlements de comptes à Marseille: des familles assignent l'Etat en justice

Des familles marseillaises assignent l'Etat en justice. Alors que 42 personnes ont déjà été tuées depuis le début de l'année et 109 autres blessées sur fond de trafic de drogue dans la cité phocéenne, un collectif de familles réclame le retour de l'Etat de droit.
Un référé-liberté a été déposé cette semaine. 51 familles de victimes des quartiers Nord de la ville demandent au tribunal de Marseille "le retour de l'Etat de droit dans les quartiers abandonnés". Une démarche inédite pour obliger l'Etat à agir alors que depuis le début de l'année, les morts se succèdent dans des règlements de comptes en lien avec le trafic de stupéfiants.
Depuis la mort de son fils, poignardé l'an dernier dans une chambre d'hôtel, Fana se sent abandonnée.
“Bien sûr qu’il faut que ça cesse. Ce sont des enfants de 15, 16 ans… Mais vous vous rendez compte qu'à cet âge-là normalement, ils sont scolarisés”, dénonce-t-elle.
"On compte les morts"
Alors, avec 50 autres habitants, elle a décidé d'aller en justice pour obliger l'Etat à mettre un terme aux violences et au trafic de drogue à Marseille. “En fait, on n’existe pas. On peut avoir des morts tous les jours, le fait divers va passer, mais nous, les mamans, nos enfants, nos frères et sœurs, on va juste compter les morts. C’est tout”, déplore-t-elle.
"On espère un nouveau souffle pour nos quartiers, confie aussi Amine Kessaci, fondateur et président de l’association “Conscience", sur RMC. C'est notre dernier espoir de vivre autrement, sans cette boule au ventre de savoir si nos enfants vont rentrer le soir à la maison. On en a marre de présenter nos condoléances toutes les semaines. C'est trop, on ne peut plus vivre comme ça. On assiste à des actes de guerre quotidiennement, ce n'est plus possible."
Leur avocat, maître Croizet, justifie cette procédure contre l'Etat par l'urgence de la situation.
“Depuis au moins 20 ans, on nous promet le retour de l’Etat dans les quartiers. Si on nous promet le retour de l’Etat dans les quartiers, ça veut dire qu’il n’y est pas. Ce qui veut dire que les gens qui vivent dans ces quartiers n’ont pas les mêmes droits, ne sont pas traités de la même façon, de manière égale à ceux qui n’y habitent pas. Ça montre qu’il y a un problème, ça s’appelle une rupture d’égalité”, explique-t-il.
Si elle est jugée recevable, cette requête devrait être examinée d'ici la fin de la semaine. Les familles marseillaises se félicitent déjà de l'écho suscité par leur initiative.