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"Envie de pleurer": à Neuilly, des habitants sous le choc après la condamnation de Nicolas Sarkozy

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Cinq ans de prison pour Nicolas Sarkozy, reconnu coupable d'association de malfaiteurs dans l'affaire du financement libyen de sa campagne de 2007. Le tribunal a estimé que les faits reprochés à Nicolas Sarkozy étaient de nature à "altérer la confiance des citoyens". Mais dans le fief de l'ancien président, à Neuilly-sur-Seine, dont il a été le maire pendant 19 ans, les habitants sont perplexes.

Reconnu coupable d’association de malfaiteurs dans l’affaire du financement libyen de sa campagne de 2007, Nicolas Sarkozy a été condamné hier à cinq ans de prison avec incarcération prochaine. Le tribunal correctionnel lui reproche d'avoir "laissé ses plus proches" démarcher la Libye de Mouammar Kadhafi pour financer sa campagne électorale. Claude Guéant et Brice Hortefeux, ont également été reconnus coupables d'association de malfaiteurs.

Les faits reprochés sont d'"une gravité exceptionnelle", "de nature à altérer la confiance des citoyens", a insisté la présidente du tribunal. Mais cette condamnation laisse les habitants de Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine) perplexes. Nicolas Sarkozy a été maire de cette ville cossue pendant 19 ans et la plupart des habitants rencontrés jeudi jugent la peine trop sévère.

“J’ai envie de pleurer de tristesse. J’ai envie qu’on lui foute la paix”, indique une habitante.

"Je ne suis pas sarkozyste mais..."

“C’est normal qu’il ait été condamné, mais après cinq ans, je trouve ça énorme surtout avec l’exécution provisoire de l’emprisonnement. Je ne suis pas sarkozyste, mais je trouve ça un peu exagéré”, tranche un autre.

“La juge fait ça pour l’honneur de la France, mais c’est l’inverse. Condamner un ancien président qui par ailleurs a fait des tas de choses bien, je trouve ça nul”, souligne une retraité.

"L'excéution provisoire" au coeur du débat

Un ancien président français en prison, la pilule est difficile à avaler pour Chafiq, habitant d’Issy-les-Moulineaux. "Le problème, c'est l’exécution provisoire, il va quand même faire sa peine même s'il a fait appel. Ce n'est pas suspensif. Après, supposons qu'il soit jugé innocent, et bien c'est foutu, c'est trop tard, ce n'est vraiment pas une bonne chose", estime-t-il.

Le 3216 RMC : Condamnation de Nicolas Sarkozy, qu'en pensez-vous ? - 26/09
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Pour justifier cette condamnation, le tribunal correctionnel de Paris souligne la "gravité exceptionnelle" des faits reprochés. Une décision sévère selon Blaise. “Pour moi le mandat de dépôt, c’est quelque chose qui devrait être appliqué en fonction de la dangerosité des personnes et je pense qu’actuellement, il n’est plus trop dangereux. Donc, pour le coup, peut-être que le mandat de dépôt est exagéré”, pointe-t-il. Thierry veut croire à un effet dissuasif.

“Ce n’est pas parce qu’on a été président qu’on peut échapper à tout. Donc, pour moi, c’est normal. Sinon ça veut dire que tout est permis”, estime-t-il.

Pour une partie des personnes rencontrées, un président doit être irréprochable et faire figure d'exemple pour les citoyens. Cette peine renvoie donc une mauvaise image de la France selon eux.

L'exécution provisoire également remise en doute par les politiques

La condamnation de Nicolas Sarkozy a évidemment fait grandement réagir la classe politique. Le Président du Sénat, Gérard Larcher, affirme qu'il y a un "questionnement grandissant sur l'exécution provisoire". Et Marine Le Pen, condamnée il y a quelques mois elle aussi avec exécution provisoire pour sa peine d'inéligibilité, estime que l'exécution provisoire "représente un grand danger".

Pour le député Philippe Ballard, cette application de la peine avant le procès en appel, c'est “la négation du double degré de juridiction qui représente un danger pour le système judiciaire, et même la démocratie française parce qu’on peut se poser la question: où est la présomption d'innocence?”.

Le sénateur LR Stéphane Le Rudulier souhaite modifier la loi pour permettre de contester une exécution provisoire.

“Je pense que le législateur devrait s’interroger afin de permettre un recours pour ne pas avoir le sentiment d’inachevé voire parfois d’injustice”, indique-t-il.

Des arguments balayés par le sénateur communiste Ian Brossat. “Tout ça donne le sentiment que les puissants se serrent les coudes dès lors qu’ils sont concernés par des condamnations. Et ça, pour la grande majorité des Français, ça a quelque chose de profondément répugnant”, pointe-t-il.

L'élu parisien le rappelle: l'exécution provisoire est prononcée dans d'autres cas, sans rapport avec les responsables politiques.

Cassandre Braud, Romain Cluzel et Marion Gauthier avec Guillaume Descours