Suspension de la réforme des retraites: combien coûterait-elle?

Pour trouver une issue à la crise politique actuelle, Élisabeth Borne a ouvert, mardi, la porte à une éventuelle suspension de la réforme des retraites mise en place en 2023. L’objectif est de parvenir à un compromis budgétaire et de permettre au bloc central de s’allier avec des partis de gauche. Cette suspension pourrait avoir de nombreux effets sur l’économie française.
Une réforme emblématique d'Emmanuel Macron
Il y a trois types de coûts: le coût politique, économique et financier… D'abord, ce serait renoncer ce serait renoncer en partie (et peut-être définitivement…) à la réforme la plus emblématique des deux mandats d’Emmanuel Macron, dont il ne resterait alors presque rien.
Ce serait alors un énorme échac pour le président de la République. Depuis 1981, huit grandes réformes des retraites ont été menées, toutes réussies par ses prédécesseurs. Emmanuel Macron serait le seul à avoir échoué sur deux réformes: la retraite à points et le report de l’âge légal à 64 ans.
L'économie fortement impacté
La France est le pays où l’on travaille le moins et où les retraités vivent le mieux. Mécaniquement, le coût des cotisations sociales est de plus en plus élevé, ce qui pénalise la compétitivité de nos entreprises. La preuve: nous avons à la fois le plus gros déficit public et le plus important déficit commercial d’Europe.
Repousser l’âge de départ à la retraite reste le moyen le plus efficace pour faire travailler davantage la population. Ce plan est déjà largement appliqué chez nos voisins européens, où l’âge légal se situe désormais entre 65 et 67 ans. L’âge réel de départ est encore plus élevé: un an supplémentaire en Belgique et en Espagne, deux ans en Allemagne, et trois ans en Italie, selon les chiffres du Conseil d’orientation des retraites (COR). Les entreprises paieraient très cher ce retour en arrière.
Une addition entre 6 et 13 milliards d'euros
Geler la réforme reviendrait à instaurer l’âge légal de départ à la retraite à 63 ans. Cela coûterait 6 milliards au système en 2035, et 13 milliards toutes charges comprises (recettes en baisse, moins d’actifs), prévient la Cour des comptes.
Mais ce n’est pas le pire : la réforme des retraites a déjà engendré des coûts importants (grèves, renoncement à d’autres réformes). Les investisseurs internationaux recevraient un message très négatif: la France ne serait pas capable de se réformer ni de redresser ses comptes publics, alors que les déficits espagnols et italiens ont diminué de moitié en quatre ans.
Logiquement, une sanction suivrait: une hausse d’un demi-point des taux à 10 ans représenterait un coût de 15 à 20 milliards, soit plus que le coût du report...