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Éducation

Gabriel Attal à Matignon: les syndicats d'enseignants déplorent son "passage éclair" à l'Éducation

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Les principaux syndicats enseignants ont déploré mardi un "passage éclair" de Gabriel Attal au ministère de l'Education, jugeant que ce poste n'avait été qu'"un marche-pied" pour le nouveau titulaire de Matignon.

L'ambitieux Gabriel Attal, nommé mardi 9 janvier 2024 Premier ministre, aura fait une très brève incursion de moins de six mois au ministère de l'Éducation nationale, le temps de faire des annonces en cascade, mais pas d'en voir encore beaucoup d'effets.

"À peine six mois, c'est un passage éclair, avec des annonces éclair dont on peut se demander si elles n'étaient pas destinées à une ambition politique", lance Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes-FSU, premier syndicat enseignant du second degré (collèges et lycées).

Nommé ministre de l'Éducation nationale le 20 juillet en remplacement du discret Pap Ndiaye, Gabriel Attal, 34 ans, sera resté cinq mois et vingt jours, soit le deuxième séjour le plus court à ce poste sous la Ve république après celui de Benoît Hamon en 2014 (quatre mois et 24 jours).

À son arrivée, il imprime d'emblée un changement de ton et incarne une ligne de fermeté, rompant avec les hésitations de son prédécesseur. Après les émeutes de fin juin, il souhaite "remettre le respect de l'autorité et les savoirs fondamentaux au coeur de l'école".

Pour trancher sur des dossiers en suspens, il annonce dès fin août le report des épreuves de spécialités du baccalauréat de mars à juin, puis l'interdiction de l'abaya à l'école.

Le sujet de l'abaya domine médiatiquement la rentrée de septembre, au grand dam des syndicats enseignants, éclipsant la crise du recrutement des professeurs, avec encore plus de 3.100 postes non pourvus aux concours.

Adepte de l'"électrochoc"

Le ministre s'attaque ensuite au harcèlement scolaire, priorité du gouvernement, au coeur de l'actualité après le suicide à la rentrée de Nicolas, un adolescent de Poissy (Yvelines).

Gabriel Attal appelle à un "électrochoc collectif", avant l'annonce fin septembre d'un plan interministériel sur le sujet, avec notamment la création de cours d'empathie à l'école.

Après la mort de Dominique Bernard le 13 octobre, enseignant de français poignardé à mort à Arras (Pas-de-Calais), le très actif ministre affiche de nouveau sa fermeté: saisines du procureur de la République et procédures disciplinaires à l'encontre des élèves ayant perturbé l'hommage au professeur, annonce de mesures pour "sortir" les élèves radicalisés des établissements scolaires.

"Le pas de vague, c'est fini", assène-t-il à l'Assemblée nationale.

C'est sur "l'élévation du niveau des élèves" que le ministre annonce sa dernière salve de mesures début décembre, dans la foulée des résultats décevants de l'étude internationale Pisa.

Après deux mois d'une mission "Exigence des savoirs" lancée en grande pompe sur l'esplanade de la Bibliothèque nationale François-Mitterrand, il égrène ses solutions: nouvelle épreuve de maths au bac en première, création de groupes de niveaux au collège, entrée au lycée conditionnée à l'obtention du brevet, retour controversé du redoublement, nouveaux programmes au primaire.

"Marchepied"

Au risque de se voir taxer de nourrir une vision passéiste de l'école, il s'apprêtait à continuer sur le même rythme en détaillant une expérimentation du port de l'uniforme à l'école, au collège et au lycée.

Il devait aussi esquisser jeudi, lors de ses voeux à la presse, de futures annonces sur la formation des enseignants, la sécurité des professeurs ou la mise en place des premiers cours d'empathie à l'école.

De ces cinq mois d'annonces, qui ont nourri son ascension dans les sondages, celui qui était le plus jeune ministre de l'Éducation nationale de la Vᵉ République n'aura pas eu le temps de mesurer l'impact réel.

Il a toutefois assuré mardi qu'il resterait "toujours" aux côtés du monde enseignant, en concluant une réunion en visioconférence avec des chefs d'établissements, au moment même où se répandait l'annonce de sa nomination effective à Matignon.

Pour Catherine Nave-Bekhti, secrétaire générale du Sgen-CFDT, son départ "interroge sur l'importance accordée ou non aux enjeux éducatifs par l'exécutif" et sur "la continuité de la politique éducative".

"C'est assez surprenant de rester si peu de temps alors qu'il avait dit vouloir se plonger dans des réformes structurelles pour l'école", s'agace aussi Guislaine David, secrétaire générale de la FSU-SNUipp, principal syndicat du primaire.

Mais "on savait aussi qu'il était là pour sa carrière et que le poste de ministre de l'Éducation nationale n'était qu'un marchepied".

CA avec AFP