Le porno est-il en train de banaliser et multiplier la violence sexuelle des jeunes?

(illustration) - AFP
Le porno en ligne est-il en train de libéraliser la violence sexuelle? Un inquiétant chiffre nous vient du Royaume-Uni: pour près de la moitié des jeunes Anglais, les filles "s'attendent" à ce que les rapports sexuels impliquent une agression physique. C'est un rapport publié mardi sur l'impact de la pornographie sur les jeunes qui rapporte cette évolution peu rassurante sur l'éducation sexuelle de la jeunesse.
Ce rapport "met en évidence le besoin urgent de protéger les enfants contre les méfaits de la pornographie en ligne", a dit Rachel De Souza, la commissaire à l'enfance, qui dirige un organisme public chargé de protéger les droits des enfants.
Huit jeunes sur dix ont vu de la pornographie violente avec des actes sexuels coercitifs avant l'âge de 18 ans
Les chiffres sont peu surprenants mais édifiants: un enfant sur dix a vu de la pornographie à l'âge de neuf ans, selon cette enquête réalisée en Angleterre auprès de 1.000 jeunes entre novembre et janvier. La moitié des adolescents de 13 ans ont été exposés à de la pornographie. Près de huit jeunes sur dix ont vu de la pornographie violente impliquant des actes sexuels coercitifs, dégradants ou douloureux avant l'âge de 18 ans.
Selon ce rapport, "les utilisateurs fréquents de pornographie sont plus susceptibles de se livrer à des actes sexuels physiquement agressifs". A ce sujet, 47% des personnes interrogées estiment que les filles "s'attendent" à ce que les rapports sexuels impliquent une agression physique. Et 42% pensent que la plupart des filles "apprécient" les actes d'agression sexuelle.
Des images qui se transposent à la vie réelle
Près d'un jeune sur deux âgé de 18 à 21 ans a subi un acte sexuel violent, défini comme étant agressif, coercitif ou dégradant. "Les filles sont significativement plus susceptibles que les garçons d'avoir été victimes" d'un tel acte, précise le rapport.
"Permettez moi d'être claire", écrit Rachel De Souza dans l'introduction du rapport: "Les contenus pour adultes auxquels les parents ont pu avoir accès dans leur jeunesse pourraient être considérés comme 'pittoresques' par rapport au monde actuel de la pornographie en ligne".
Etranglement pour le premier baiser à ... 12 ans
"Les représentations d'avilissement, de coercition sexuelle, d'agression et d'exploitation sont monnaie courante et visent de manière disproportionnée les adolescentes", alerte-t-elle.
"Je n'oublierai jamais la fille qui m'a raconté son premier baiser avec son petit ami, âgé de 12 ans, qui l'a étranglée. Il l'avait vu dans des films pornographiques et trouvait cela normal".
"Je suis profondément préoccupée par la normalisation de la violence sexuelle dans la pornographie en ligne et par le rôle qu'elle joue dans la formation des enfants en matière de sexualité et de relations", indique la commissaire.
Près de 40% des jeunes de 16 à 21 ans disent être accidentellement tombés sur de la pornographie sur internet. Mais la moitié des personnes interrogées (58% des garçons et 42% des filles, âgés de 16 à 21 ans) disent avoir elles-mêmes recherché de la pornographie en ligne.
En France, les contenus de plus en plus trash, disponibles gratuitement et sans contrôle d'identité quasi partout dans le monde, avaient également été épinglés par le Sénat en août 2022.