Noël: va-t-on manquer de livres sous le sapin à cause de la pénurie de papier et de carton?
C’est une crise inédite que vit le monde de l’édition. Le papier et le carton manquent. Il faut désormais compter 15 semaines pour se faire livrer des commandes qui arrivent normalement en trois semaines. Et pour certains produits comme les cartes de couverture, les délais peuvent atteindre 4 à 6 mois.
Résultats, les prix flambent. Plus 8 à 10% depuis un an pour le papier, mais surtout, on s’attend à une hausse de 20 à 30% dans les mois qui viennent. C’est la loi de l’offre et de la demande. La demande, aujourd’hui, est bien supérieure à l’offre, et le papier devient un produit de luxe.
Comment font les éditeurs ?
Ils jonglent, ils bricolent et ils disent tous qu’ils n’ont jamais connu une période aussi tendue. Prenez par exemple un des grands succès du moment. Le livre des journalistes Davet et Lhomme sur Emmanuel Macron ”Le traître et le Néant”. Il a été tiré au départ à 32.000 exemplaires, mais il se vend très très bien et on est en train d’en imprimer 100.000 de plus. Fayard fractionne ses commandes en fonction des disponibilités des imprimeurs. On en est à 11 réimpressions, avec du coup des qualités de papier différentes, certains livres sont plus jaunes d’autres plus blancs. Et tous n’ont pas la même épaisseur ce qui est compliqué en termes de fabrication.
C’est un véritable gymkhana, une course d’obstacles, me disait l’éditrice. Et dans 12 jours, le 3 novembre, ce sera encore plus compliqué pour l’éditeur qui aura le bonheur de remporter le prix Goncourt. Les grandes maisons ont stocké du papier au cas où, mais les délais de réimpressions seront plus forcément plus longs.
Comment explique-t-on cette pénurie de papier ?
C’est d’abord une crise mondiale de la logistique qui touche toutes les matières premières. Une forte reprise de la consommation et le transport qui ne suit pas. Ça bouchonne dans tous les grands ports, les conteneurs s'entassent, les chauffeurs manquent pour assurer les livraisons.
En ce qui concerne les cartons et le papier, les principaux fabricants sont dans les pays scandinaves, là où se trouve les plus grandes forêts, mais ils dépendent aussi de matières premières qui viennent d’Asie et d’Amérique latine, avec des coûts de transports qui ont été multiplié par dix.
Mais la crise est aussi due à l’augmentation de notre consommation, de papier, mais surtout de carton. On a commencé à supprimer les plastiques à usage unique pour les remplacer par des cartons par exemple les pailles ou les gobelets.
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On a surtout une explosion de la demande de cartons d’emballage (plus 30%) qui s’explique par la progression du commerce en ligne. Ce qu’on pourrait appeler l’effet “Amazon”. Chaque fois que l’on se fait livrer un objet que l’on aurait acheté auparavant, on surconsomme le carton.
Enfin, sur le marché français, la crise a été aggravée par un mouvement de panique. Les imprimeurs, craignant les pénuries, ont fait des stocks.
En attendant, on risque de manquer de livres, mais aussi de bibliothèques pour les ranger. La pénurie touche aussi la bibliothèque la plus vendue au monde. La Billy de chez Ikéa. 60 millions d’exemplaires depuis sa création. Elle est en rupture de stock partout dans le monde. Parce que les livres et les bibliothèques Billy sont fabriqués avec la même matière première. La sciure de bois qui actuellement est une denrée rare.