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"C'est déjà demain": "Stop Covid", une efficacité à prouver

La fameuse application de traçage des smartphones, objet de débats houleux, pourrait être disponible à partir de ce week-end. On a un peu plus de détails sur son fonctionnement et surtout quelques doutes sur son efficacité.

Le gouvernement a diffusé quelques captures d’écran qui montrent comment va fonctionner l’application “StopCovid”. Une application qui permettrait de retracer le parcours d’un patient atteint du coronavirus et prévenir les personnes qui ont croisé son chemin ces 15 derniers jours en utilisant le bluetooth de nos smartphones. 

En clair, on télécharge l’application, sur la base du volontariat-, on active le bluetooth et à chaque fois qu’on croise une autre personne à moins d’un mètre pendant plus de 15 minutes et qui a aussi téléchargé l’application, nos smartphones vont se “parler”, s’envoyer une petite signature électronique qui va être enregistrée. Ensuite, imaginons que demain je sois testé positif au covid, le laboratoire m’envoie un code à entrer dans l’application, et l’application va envoyer une alerte à toutes les personnes qui ont été à proximité de mon téléphone, sans leur divulguer mon identité évidemment, pour les inviter à consulter un médecin et à se faire tester. 

Sur le papier, c’est intéressant, mais son efficacité est remise en cause. Tous les débats portent sur le côté “big brother”, de la protection des données personnelles. Mais la vraie question, c’est celle de l’efficacité de cette application pour casser les chaînes de transmission. 

Pour que l’outil soit efficace, il faut qu’il soit massivement téléchargé, de l’ordre de 60% de la population selon les experts. Et c’est loin d’être évident. Et ça va être compliqué, ne serait-ce que d’un point de vue mathématique. D’abord, on enlève tous ceux qui n’ont pas de smartphone, ça fait presque un quart des Français. Ensuite, parmi ceux qui ont un smartphone, on enlève ceux qui ont un iPhone, car l’appli fonctionne très mal soit une personne sur 5. Ca réduit encore le champ. 

Ensuite, il faut accepter de télécharger volontairement l’application. Ca fait encore moins de monde. Puis, si vous tombez malade, il faut, encore une fois volontairement le déclarer via l’application, et ce n’est pas sûr que tout le monde le fasse. Ca fait donc énormément de conditions.

Peu de réussite à l'international

On se rend compte qu’à l’étranger, les résultats sont loin d’être probants : en Australie par exemple, en un mois, l’application de traçage n’a permis de détecter qu’un seul cas.

Ils ont lancé une application qui s’appelle “CovidSafe” il y a un mois environ, qui fonctionne sur le même principe que StopCovid. Six millions de téléchargements sur 24 millions d’habitants, ce qui est pas mal, et l’application n’a permis de détecter qu’un seul cas de Covid positif sur l’ensemble du pays. Et de prévenir une personne qui a été en contact avec elle. Un bide total... 

Singapour, qui a lancé une application, “TraceTogether”, qui fonctionne exactement sur le même principe et qui a fini par ordonner un confinement général. Sur la base du volontariat, moins de 20% de la population avait téléchargé l’application. Plus près de nous, en République Tchèque, moins de 2% ont téléchargé l'application, en Autriche 6%. La Belgique a complètement renoncé. 

Autre exemple, l’Islande, qui a mis en place un outil de traçage au mois d’avril, téléchargé par 40% de la population environ. Et même là, les autorités estiment que ça n’a pas changé la donne.

Anthony Morel