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"C'est pathétique": l'AP-HP va saisir la justice après la mise en vente par un chirurgien d'une radio d'une blessée du Bataclan

La radio de la victime du Bataclan avait été mise en vente pour la somme de 2.776 dollars sur un site spécialisé de vente d'objets numérique NFT.

Les hôpitaux de Paris vont saisir la justice après la révélation samedi par Mediapart qu'un chirurgien a tenté de vendre une radio d'une blessée de l'attaque du Bataclan le soir des attentats du 13-Novembre 2015, a indiqué sur Twitter le patron de l'AP-HP Martin Hirsch.

"Cet acte est contraire à la déontologie et met en cause le secret médical. Un tel comportement est indigne (…) Nous allons saisir le conseil de l’Ordre, signaler à la justice en application de l’article 40 du code de procédure pénale et saisir les ministres qui disposent du pouvoir disciplinaire", assure-t-il très remonté.

Selon Mediapart, ce chirurgien orthopédiste réputé, Emmanuel Masmejean, a mis aux enchères pour 2776 dollars sur OpenSea, un site spécialisé dans la vente d'objets numériques NFT, la radio d'une survivante du Bataclan qu'il avait opérée, sur laquelle on voit un avant-bras transpercé par une balle de Kalachnikov. "Cette jeune patiente, qui a perdu son petit ami dans cette attaque, avait une fracture ouverte de l'avant-bras gauche avec une balle restante de Kalachnikov dans les tissus mous", peut-on lire dans la description du document.

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"La dignité humaine devient une valeur secondaire"

Le chirurgien a reconnu les faits, mais a évoqué auprès de Mediapart une diffusion à "vocation pédagogique" contestant avoir voulu la mettre en vente, "Je démens la mise en vente de quoi que ce soit", assure-t-il à 20 Minutes. 

"Quand on met un post sur la blockchain, ça s’appelle une NFT. On paie, il y a un coût, et on peut proposer une valeur. Donc j’ai proposé une valeur, ce qui était une erreur. Mais ça ne veut pas dire que je la vends, ce n’est pas une vente", ajoute-t-il présentant "ses excuses" et se disant "désolé".

"Je trouve que cela en dit long sur la déshumanisation. C’est finalement une forme de banalisation et de marchandisation du corps. Je trouve ça pathétique. Cela montre qu’il y a un affaiblissement éthique moral, très profond et que la dignité humaine devient une valeur secondaire", déplore au micro de RMC François Zimmeray, président de l'Association française des victimes de terrorisme.

"Vous avez beau être proche d’une victime, vous avez beau être médecin, vous avez beau avoir fait des radios d’une intervention chirurgicale, on en se rend pas compte de la blessure qui est à l’intérieur et qui ne se voit pas. C’est ça que dit cette affaire", ajoute-t-il désabusé.

La rescapée est "extrêmement choquée" par la "démarche mercantile" et le "mépris" du médecin, a indiqué lundi son avocate dans un communiqué à l'AFP. "Ce médecin, non content de violer le secret médical de cette patiente, a jugé bon de décrire sur le site de vente en ligne la vie privée de cette jeune femme, la rendant ainsi parfaitement identifiable", a assuré Me Elodie Abraham au sujet de sa cliente, qui souhaite garder l'anonymat.

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Guillaume Dussourt avec AFP