Toussaint: "Avant d’être chrétiens, on est français", l’avis tranché d’Arthur Chevallier

La Toussaint, c’est-à-dire la célébration des saints dans la tradition chrétienne, est un jour férié, ce vendredi. Un jour férié religieux, donc, dans une République laïque. Mais ça n’a rien de bizarre. Et ça n’a même rien à voir avec le débat très "relou" sur les racines chrétiennes de la France. D’abord parce que la France, ce n’est pas une plante, elle n’a pas de racines. C’est un pays. En revanche, elle a des origines. Et de ce point de vue, il n’y a pas débat: notre histoire est liée à celle de la chrétienté.
Mais nos présidents ne représentent aucune religion. Parfois, ils sont croyants, et on n’y peut rien. Alors l’idée, c’est d’arriver à séparer l’homme public, le président, qui doit être neutre, et l’homme privé, qui a le droit de croire. Le général de Gaulle était par exemple très pratiquant. Mais il ne voulait pas s’afficher, donc il avait fait construire une chapelle à l’Elysée pour faire ça discrètement. Dieu, ça n’intéressait pas trop Jacques Chirac, mais il avait une petite tradition, c’était d’aller à la messe de la ville de Bormes-Les-Mimosas quand il était dans sa résidence d’été, au Fort de Brégançon. Nicolas Sarkozy, c’est encore autre chose. Il avait déclenché une polémique après un voyage au Vatican en 2010. On l’avait vu faire des signes de croix. Sacrilège. La gauche avait hurlé: quoi, comment, la République, la laïcité, la France, etc. Et finalement, c’était passé.
La séparation de l’Eglise et de l’Etat, c’est très ancien
L’histoire chrétienne de la France, traditionnellement, on fait remonter ça à Clovis. C’était le roi des Francs, et il est le premier à s’être fait baptiser. On ne sait pas trop quand, a priori entre 496 et 506. C’est lui qui donne le top départ de nos relations avec Rome. Mais avec ça, on n’a qu’une partie de l’histoire. Les rois seront très chrétiens, mais à leur façon, en tenant la religion bien à distance des affaires de l’Etat. Et ça commence au Moyen Âge, avec le roi Philippe le Bel. Il décide de se débarrasser de l’Ordre des Templiers. En gros, les Templiers étaient des moines-soldats très riches et très organisés. Leur ordre était si puissant qu’il faisait de la concurrence à la monarchie. Donc le roi a décidé de les arrêter. Et même de brûler leur chef. Ça calme. Et à partir de là, nos rois iront toujours à la messe et seront plutôt sympas avec l’Eglise. Mais à condition que ça serve leurs intérêts. Entre nous et le Vatican, ça ne sera jamais l’amour fou. Plusieurs de nos rois ont même été excommuniés. Avant d’être chrétiens, on est français.
Donc, en fait, la séparation de l’Eglise et de l’Etat, c’est très ancien… La loi de 1905, c’est la formalisation de quelque chose qui était déjà dans notre ADN. Chez nous, la puissance publique, c’est sacré. Elle ne se partage avec personne, pas même avec une religion. C’est une vraie particularité française. Nous et le catholicisme, c’est un "je t’aime, moi non plus" permanent. Mais après tout, même les couples qui s’aiment se disputent.