"Je dois faire l'enquête à la place de la police": cambriolé, il se dit prêt à se faire justice

C'est une histoire rocambolesque qui alerte sur le faible taux de résolution des affaires de cambriolages. Anton, qui tient un magasin de réparation et de vente de trottinettes dans le 6e arrondissement de Lyon, a été cambriolé cinq fois depuis septembre dernier, dont deux fois en une semaine. Le dernier en date a eu lieu ce samedi. Mais cette fois, Anton réussi à identifier le voleur grâce aux caméras de surveillance. C'est en fait un habitant du quartier.
"J'ai des images de vidéosurveillance et pendant 24 secondes, on voit clairement son visage, à l'intérieur de mon commerce", explique Anton ce mardi dans "Les Grandes Gueules". Reconnaissant un habitant du quartier, Anton arrive à le "coincer" avec l'aide d'un ami. "Pendant que je le maintenais au sol, j'ai demandé à un ami d'appeler la police", raconte-t-il sur RMC et RMC Story.
Quelques heures de garde à vue avant d'être relâché
Menotté, le suspect est amené au poste. Anton présente alors toutes les preuves qu'il a en sa possession. Le fonctionnaire chargé de son dépôt de plainte reconnaît formellement le suspect. L'auteur présumé des faits serait un multirécidiviste depuis le milieu des années 80. Mais après quelques heures de garde à vue, le suspect est relâché, explique Anton, qui assure que les policiers ne sont pas venus relever d'empreintes pour ce cinquième cambriolage.
"Les policiers m'ont demandé si j'avais des empreintes et de l'ADN. Ce n'est pas mon travail, je n'en ai pas, mais j'ai dit que j'avais des images vidéos, ils m'ont répondu que c'était 'plus compliqué que ça'. Pour qu'il y ait une suite, il faut que je continue l'enquête. Je dois faire l'enquête à la place de la police. Il faut aussi que la personne me recambriole, on dirait", s'inquiète le vendeur de trottinettes.
"Le standard de preuve exigé par les tribunaux pour réprimer un cambriolage n'est pas très élevé" note, sur le plateau des "Grandes Gueules", l'avocat Charles Consigny. "La vidéo est le meilleur élément, après il y a aussi le bornage téléphonique et des témoignages. En principe, quand quelqu'un est multirécidiviste, la justice met des peines à exécution avec mandat de dépôt et les gens vont en prison. Il y a manifestement un dysfonctionnement et un certain laisser-aller", ajoute le conseil.
Aujourd’hui, le commerçant est écœuré et se dit prêt à se faire justice lui-même la prochaine fois. "J'ai son nom, son prénom, son adresse. J'irai chez lui, j'irai lui passer l'envie de venir", assure Anton.
Un chef d'entreprise condamné pour avoir retenu un cambrioleur pendant 20 minutes
En France, 92% des cambriolages ne sont pas élucidés. Et parfois, ce sont les victimes qui sont condamnées. C'est ce qui est arrivé à Mickaël, chef d’entreprise à Marseille, condamné à de la prison avec sursis pour "séquestration", après avoir retenu un cambrioleur en attendant l’arrivée de la police: "Ils sont entrés à trois chez moi. J'en ai maîtrisé un et les deux autres sont partis. J'ai fait des sports de combat mais je ne l'ai pas tapé. Je ne l'ai pas attaché, je l'ai maintenu en attendant la police qui est arrivée 20 minutes après".
"Ce mineur de 17 ans a pris six mois de sursis pour tentative de cambriolage, j'ai pris deux ans de sursis avec mise à l'épreuve et obligation de soin pour séquestration. On m'a dit qu'il aurait mieux fallu le laisser sortir et le rattraper dehors", explique Mickaël aux "Grandes Gueules".
"Le problème, c’est l’interprétation que fait la justice de l’événement", déplore Jean, policier à Lille. "C'est le choix politique de l’administration et du gouvernement qu’il faut remettre en cause. Ils veulent remettre des uniformes sur le terrain et cela se fait au détriment de l’investigation, la seule qui amène à identifier les auteurs et les présenter à la justice", estime le fonctionnaire.