Dénoncer les salariés flashés, une réalité dans certaines entreprises

"Si nous ne dénonçons pas, nous sommes obligés de mentir aux autorités administratives", explique un DRH. - Philippe Huguen - AFP
Jusqu'à maintenant, rien n'obligeait les entreprises à dénoncer un salarié lorsqu'il commettait une infraction au volant d'une voiture de la société. Si celui devait le plus souvent s'acquitter de l'amende, il échappait toutefois à la perte de points. Ce ne sera bientôt plus possible. Le Conseil national de la sécurité routière (CNSR) vote ce lundi 11 mai une recommandation pour mettre fin à cette impunité.
Le CNSR veut obliger les entreprises à transmettre le nom à la police et sanctionner les personnes morales (entreprises- administration - association) qui ne le font pas. Le CNSR rappelle que la route est la première cause de mortalité dans les accidents du travail. Les voitures professionnelles représentent 10 à 15% des flashs des radars.
"C'est votre permis pour votre travail qui est en jeu"
Certaines entreprises ont pris les devants et obligent déjà leurs salariés à se dénoncer auprès de la police. C'est le cas de SGS, une grosse entreprise de certification dont le siège se trouve en banlieue parisienne, et qui emploie 2.600 personnes en France. Marie est commerciale dans cette entreprise, elle a déjà perdu deux points sur son permis. "Je me suis fait flashée deux fois sur des autoroutes. Et j'ai reçu les éléments chez moi", raconte-t-elle à RMC.
Si elle a été "étonnée au début de cette pratique", elle reconnaît qu'elle fait désormais plus attention. "Là c'est votre permis qui est en jeu, donc votre permis pour votre travail. Quand vous êtes manager commercial et que vous n'avez plus de permis, c'est compliqué d'aller voir le client". Marie accepte totalement d'être dénoncée par son employeur. "On n'est pas dénoncés aux yeux de tout le monde. On n'est pas du tout dans une politique de délation et on ne montre pas du doigt la personne qui a été flashée".
"Nous mentons aux autorités"
Une politique assumée qui a tout de même été difficile à faire avaler au début, raconte le directeur des ressources humaines, Francis Bergeron. "C'est un débat qui a posé des problèmes avec certains présidents de filiale qui nous ont expliqué qu'une telle attitude rappelait les heures les plus noires de notre histoire. Il y avait une espèce de dramatisation de la problématique".
Mais pour Francis Bergeron, il est temps de mettre fin à ce qu'il considère comme de l'hypocrisie. "Si nous ne dénonçons pas, nous sommes obligés de soutenir aux autorités administratives que nous ne savons pas qui est responsable du véhicule au moment de l'infraction. C'est un mensonge, et un signal très négatif. Dans notre entreprise, le premier risque est lié à la sécurité routière. C'est pédagogique".
Reste que dans cette société, cette pratique de dénonciation n'a pas fait baisser le nombre de PV, 2.000 par an en moyenne.