"Je peux acheter un garage": la galère grandissante des classes moyennes pour accéder à la propriété

La "bombe sociale" de demain? Être en CDI n'est plus suffisant pour emprunter et devenir propriétaire. Dans "Apolline Matin" ce mercredi sur RMC, la PDG de l'entreprise immobilière Nexity, Véronique Bédague, presse le gouvernement de mettre en place une "politique globale" pour répondre à la crise du logement, estimant qu'il y a un "choc d’une violence folle" dans le secteur du logement. Cette crise touche désormais les classes moyennes, alors que le plan du gouvernement pour le logement se fait toujours attendre.
Il est de plus en plus difficile de se loger dans le pays pour un nombre varié de raisons: chute des constructions neuves, concurrence des locations saisonnières, explosion des normes, peu de logements sociaux disponibles, hausse des taux d'intérêt, refus des banques sur les prêts...
"Est-ce qu'il faut être millionnaire pour emprunter 100.000 euros?"
De nombreux Français se retrouvent dans l'impossibilité d'acheter alors qu'ils sont en situation stable. C'est le cas par exemple de Joris, à Saint-Nazaire, âgé de 34 ans, en CDI, avec un salaire de 1.400 euros. Une situation stable qui plaît aux banques, se dit Joris, qui souhaite devenir propriétaire. Il toque à la porte de son banquier en mars dernier pour emprunter 100.000 euros.
"Il a dit 'pas de souci', mais que si on a 10.000 euros d'apport. Pour quelqu'un comme moi, c'est énorme, je ne les ai pas pour l'instant. Est-ce qu'il faut être millionnaire pour emprunter 100.000 euros?", s'interroge-t-il.
Même réponse lorsqu'il demande les services d'un courtier. "Je peux acheter un garage dans la rue à côté, en gros. Je suis blasé, en fait. J'ai quand même le droit d'acheter un appartement décent à mon âge".
"Il faut lever les contraintes: accepter des prêts sur des durées plus longues, avec un endettement un peu plus élevé"
Dans sa ville, Saint-Nazaire, les prix de l'immobilier ont augmenté de 25% en trois ans. Mais ce n'est pas la seule explication. L'accès à l'emprunt est de plus en plus difficile, explique Sandrine Allonier, porte-parole de "Vous financer", courtier en crédit. "Les taux de crédits ont fortement augmenté, ils ont triplé en deux ans. Les banques sont moins incitées à prêter en raison de l'inflation", confirme-t-elle.
"La solution est que les banques acceptent de prêter davantage, à des profils plus élargis. Pour ça, il faut lever les contraintes: accepter des prêts sur des durées plus longues, avec un endettement un peu plus élevé", réclame-t-elle.
Pour inciter les banques à prêter, Bercy réfléchit en ce moment à assouplir les conditions d’accès au crédit immobilier.
Logement neuf: "On l'aurait fait en Espagne"
Mais l'emprunt des banques n'est pas le seul problème. Jean-Baptiste, auditeur RMC, avait pour projet de faire construire un éco-habitation dans l'Aude mais aujourd'hui, en raison de la conjoncture, il "regrette clairement". Il a commencé il y a un an et estime avoir eu un peu de chance en ayant signé avec un taux d'emprunt assez correct (1.75%). Pourtant, la situation n'est pas idéale pour lui.
"Quand on voit les taxes, le manque d'aide et les fins de mois difficiles, clairement, on n'aurait pas fait ça. On paye le crédit mais on n'a pas encore la maison. On a été obligés de rendre notre location pour vivre dans un camping-car sur notre terrain...", détaille-t-il, fataliste. "A le refaire, on ne l'aurait pas fait en France, on serait partis, on l'aurait fait en Espagne", conclut-il.