Lactalis réduit sa collecte de lait français: "Coup de tonnerre" pour 800 producteurs impactés

Une "déflagration" pour les producteurs laitiers. La multinationale Lactalis, qui revendique le titre de premier groupe laitier du monde, annonce qu’elle réduira progressivement ses volumes de collecte jusqu’en 2030. Une réduction de près de 9%, soit environ 450 millions de litres de lait qui ne seront plus collectés chaque année sur ses 5,1 milliards de litres. Lactalis met en avant le fait qu’il surcollectait du lait destiné à l’export, mais les marchés étant très volatils, cela n’est plus viable pour l’industriel.
La nouvelle ministre de l'Agriculture, Annie Genevard, a reçu ce jeudi Yohann Barbe, le président de la Fédération nationale des producteurs de laitn pour assurer le secteur de son soutien. Sur RMC, ce vendredi matin, ce dernier estime à plus de 800 producteurs français au total qui pourront être impactés à terme par cette décision.
"C'est toute une filière qui s'est réveillée avec un coup de tonnerre", lance-t-il dans Charles Matin.
Il regrette surtout que Lactalis réduise sa voilure en France... alors que le groupe progresse au niveau mondial. "Ils ont décidé tout seuls d'appuyer sur le bouton", souffle-t-il, appelant les éleveurs à garder confiance: "Nous allons trouver ensemble des solutions pour éviter de se séparer de ses troupeaux de vaches laitières".
"On demande à Lactalis un peu d'empathie envers les producteurs, notamment sur les délais pour trouver une autre entreprise pour collecter", plaide Yohann Barbe.
Le groupe va d'abord réduire sa collecte "dans les zones Est et sud Pays de Loire", épargnant ainsi les grandes régions productrices, Bretagne et Normandie. "On ne rompt pas les contrats. Mais on souhaite travailler très en amont avec les organisations de producteurs sur les modalités d'accompagnement, une fois les contrats arrivés à échéance", a précisé la porte-parole.
"Il y a deux ans, ils nous ont dit: 'Faites-nous confiance, on sera toujours là'..."
Dans le sud des Pays de la Loire, ce seront environ 120 producteurs qui vont donc voir leur contrat avec Lactalis s’arrêter d’ici 2026.
Avec une centaine de vaches, Jérôme Bossard produit avec fierté 870 tonnes de lait produits par an dans la campagne vendéenne. "Avec mon frère, on ne vit que de ça... C'est tout ce qu'on a comme revenus, le lait. Et on ne fournit que Lactalis", explique-t-il.
Malgré cette dépendance, Lactalis vient pourtant de lui annoncer qu’elle ne collecterait plus son lait. "Ça a été un choc pour nous. Surtout qu'il y a deux ans, il nous ont dit: 'Faites-nous confiance on sera toujours là'...", souffle le producteur, alors que Jérôme et son frère viennent tout juste d’investir pour améliorer leurs équipements pour la qualité du lait et le confort des animaux.
Du lait étranger en compensation pour Lactalis?
La priorité est désormais de trouver une autre entreprise qui voudra bien acheter son lait, ce qui n'est pas gagné. "Dans mon secteur, on est 94 à être évincés de Lactalis. Je ne suis pas sûr que les autres entreprises aux alentours aient la capacité de récupérer ce volume-là", regrette Jérôme Brossard.
"Certains vont se poser la question d'arrêter, moi pas encore. Mais peut-être que par la force des choses, on y sera contraints...", concède-t-il.
Yohann Barbe, président de la fédération nationale des producteurs de lait (FNPL) et porte-parole de la FNSEA, craint une chose: vu que Lactalis réduit sa collecte de 450 millions de litres sans réduire la voilure de ses usines de produits laitiers, vont-ils importer du lait étranger pour compenser?
"On a une crainte, c'est qu'il y ait du lait ou de la poudre de lait ou carrément du beurre et de la crème qui viennent de l'extérieur", s'inquiète-t-il.