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"Pas des black bourges": qui sont les black blocs qui commettent des violences?

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De nouvelles violences sont craintes par les autorités ce mardi, en marge des manifestations contre la réforme des retraites. Avec des "black blocs" qui se sentent renforcés, selon un spécialiste de ce mouvement.

De la casse, des jets de projectiles, des affrontements avec les forces de l’ordre… Craignant de nouvelles violences, le ministère de l’Intérieur déploie 13.000 policiers et gendarmes, dont 5.500 à Paris, pour la 10e journée de mobilisation contre la réforme des retraites ce mardi. "Plus de 1.000 éléments radicaux, dont certains venus de l'étranger, et d'autres (qui) étaient présents à Sainte-Soline ce week-end", sont attendus selon Gérald Darmanin. Des militants qui s’organisent en black blocs, une pratique qui sort renforcée de la séquence selon un spécialiste de ce mouvement.

"Les black blocs sont revigorés, ragaillardis, assez euphoriques depuis le 49.3 et la réaction assez raide, la surdité presque, du pouvoir, explique Thierry Vincent, journaliste et auteur du livre “Dans la tête des black blocs : vérités et idées reçues” (L’Observatoire), dans ‘Charles Matin' sur RMC et RMC Story. L’attitude du pouvoir actuel, c’est le meilleur agent recruteur des black blocs. Ils ont réussi à faire annuler la visite du roi d’Angleterre, ce n’est pas rien. Là (ce mardi), c’est le match retour, ils vont être là."

"Ce n’est pas vrai qu’on est laxiste avec eux"

Mais qui sont ces personnes qui revendiquent une attitude violente en marge des manifestations? "On dit les black bloc, mais on devrait dire le black bloc, souligne Thierry Vincent. C’est une pratique de manifestation qui est née en Allemagne au début des années 1980. Cela consiste à s’habiller en noir pour s'anonymiser et à commettre des exactions, à s’en prendre aux symboles du capitalisme, les banques, les assurances, les fast-food, et à la police bien sûr. Comme ils veulent casser, et que la police veut les empêcher, il y a confrontation. La police est de plus en plus une cible. Il y a des slogans anti-policiers. Par contre, ils ne s’en prennent pas aux petits commerces. Il y a des scènes surréalistes où il y a des affrontements très violents avec la police et en face, des gens sirotant tranquillement leur Perrier ou leur bière en terrasse."

"Le black bloc, ce n’est pas une idéologie en tant que telle, ajoute l’auteur de ‘Dans la tête des black blocs: vérités et idées reçues’. C’est un mode radical et illégal de manifestation. Il n’y a pas de représentant, d’interlocuteur, et c’est leur force, à la limite. Avec qui peut négocier le gouvernement? Des gens anonymes, en noir… On ne sait pas qui c’est. Il y a des petits groupes informels. Il y a des fichés S, des fiches de renseignement. On dit toujours qu’on n’a qu’à les arrêter avant. C’est facile… Mais on est dans un état de droit, il faut prendre quelqu’un en flagrant délit et avoir des preuves pour que ça soit judiciarisé. Ce n’est pas vrai qu’on est laxiste avec eux. Quand ils sont attrapés, il y a des condamnations. Mais ils ne sont pas faciles à attraper."

"Ça se prolétarise de plus en plus"

Dans les rangs de ces auteurs de violences, beaucoup de jeunes, mais pas seulement. "Ce sont de réels militants politiques, qui sont contre la réforme des retraites, assure Thierry Vincent. Mais leur combat est bien plus large. Ils veulent très clairement renverser le capitalisme. Ils pensent, par leur violence symbolique, faire prendre conscience à un certain nombre de gens de la nocivité du capitalisme. Le black bloc est très jeune, parce que physiquement c’est dur, parce que psychologiquement on prend des risques. Quand on est jeune, on est un peu rebelle, on peut être séduit, aussi par le côté adrénaline. Et il y a une solidarité au sein du bloc."

"Ce ne sont pas des marginaux, souligne ce spécialiste. Ce sont des étudiants, des lycéens, des gens qui ont des boulots assez classiques. Ce ne sont pas des black bourges, contrairement au calembour de Gérald Darmanin que je trouve assez foireux. Ce sont des clichés un peu ridicules et ça occulte le fait que, même si ce sont au départ des gens avec un capital culturel assez élevé, ça se prolétarise de plus en plus. Et ça se répand aussi chez des syndicalistes plus classiques, qui se disent que les voies classiques ne marchent pas et que peut-être qu’il n’y a que la violence et les black blocs qui marchent."

LP