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Fermeture d’usines Michelin: "Une très mauvaise nouvelle pour les salariés, mais aussi pour Emmanuel Macron"

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Michelin a annoncé ce mardi la fermeture de deux usines, à Cholet et à Vannes. Plus de 1.200 postes sont menacés. Pour l’écrivain et éditeur Arthur Chevallier, cette nouvelle fermeture d’usine révèle quelque chose du rapport de la France à son industrie.

Ces usines Michelin qui ferment, c’est une très mauvaise nouvelle pour les salariés, bien sûr, mais aussi pour Emmanuel Macron. La réindustrialisation, c’était un des grands chantiers de son mandat. Et d’ailleurs, d’un point de vue statistique, jusqu’ici, c’était plutôt une réussite.

Ce n’est pas toujours l’impression que ça donne, mais on n’a pas fait mieux depuis très longtemps. Depuis 2017, on a créé 330 sites industriels, et 130.000 emplois qui vont avec. Alors, ce n’est pas le Pérou, mais c’est quand même la fin d’une dégringolade. Depuis le premier choc pétrolier, dans les années 1970, les usines ferment. Doucement d’abord et puis ça s’est accéléré. Entre 1995 et 2015, la France a divisé son nombre d’usines par deux.

On n’est pas les seuls puisque ça concernait tous les pays du monde, l’Allemagne, les Etats-Unis et même la Chine. Mais le pire dans tout ça, c’est la disparition des emplois. Les partis d’extrême gauche et d’extrême droite en ont profité. En parlant sans arrêt du bon vieux temps des usines, de la désindustrialisation, bref en idéalisant quelque chose qui n’avait rien d’idéal. Car c’est un mythe. Si être ouvrier ça permettait de faire fortune, on en aurait entendu parler.

La matinale 100% info et auditeurs. Tous les matins, Apolline de Malherbe décrypte l'actualité du jour dans la bonne humeur, avec un journal toutes les demies-heures, Charles Magnien, le relais des auditeurs, Emmanuel Lechypre pour l'économie, et Matthieu Belliard pour ses explications quotidennes. L'humoriste Arnaud Demanche vient compléter la bande avec deux rendez-vous à 7h20 et 8h20.
L'avis tranché d'Arthur Chevallier : Fermeture de deux usines Michelin, la promesse de Macron sur la réindustrialisation menacée ? - 06/11
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Les usines, c’était loin d’être le Club Med

Globalement, l’industrialisation en France, ça commence tout doucement à la fin du XVIIIe. On est déjà très bons dans la mode, le luxe, l’horlogerie, la tapisserie, bref des choses de précision rares et chères. Il faut attendre les années 1840 pour que l’industrie lourde commence. Et c’est en gros à cette époque qu’est née ce qu’on appelle la classe ouvrière. Et ça n’avait rien d’une bonne nouvelle.

Les ouvriers vont passer leur vie à se battre pour avoir le droit de vivre décemment. Ils seront de toutes les révoltes: celle de 1848, qui fait tomber Louis-Philippe, la Commune de 1871, la gigantesque grève d’Anzin de 1884, qui sera le modèle d’Emile Zola pour son célèbre roman sur la misère de la classe ouvrière, Germinal. Alors de temps en temps, ils obtiennent quelque chose, c’est vrai, comme le droit de grève en 1864. Au XXe siècle, ça s’améliore, mais ce n’est pas le paradis. Il faut encore se battre. Les grèves de 1936 permettent d’obtenir des congés payés, la baisse du temps de travail et une hausse des salaires. Mais ce n’est pas fini, il faut encore recommencer en 1968. Donc les usines, c’était loin d’être le Club Med.

L’industrie, pour la puissance d’un pays, c’est très bien. Les cheminées fument, les fourneaux tournent, on produit! Pour notre souveraineté, c’est très bien aussi. Mais pour ceux qui étaient dedans, ça n’a jamais été formidable. D’ailleurs, quelqu’un peut-il citer ne serait-ce qu’un film, un livre ou une série qui décrit le bonheur de la vie ouvrière? Il n’y en a pas un seul, et ça veut tout dire.

Arthur Chevallier