Canicule monstre en Inde et au Pakistan: pourquoi parle-t-on de températures "invivables"?
L’Inde et le Pakistan continuent de subir une canicule exceptionnelle. Des températures qui dépassent ce que l’on considère comme le seuil limite de survie à l'extérieur. C’est une vague de chaleur qui dure depuis deux mois maintenant et c’est la longévité de cette canicule qui la rend exceptionnelle. Les températures moyennes sont de 44 degrés et des pics ont été enregistrés à presque 50 degrés cette semaine au nord-ouest de l’Inde.
Le tout associé a un très fort taux d’humidité. Les météorologues ont un outil pour mesurer ces chaleurs particulières. Il raisonne en "degrés Humide", ou "degrés TW". Par exemple, lors de la grande canicule en France et en Europe en 2003, l’air était sec et on n’avait pas dépassé les 28 degrés TW. La canicule avait quand même causé la mort de 70.000 personnes en Europe dont 20.000 en France. En ce moment en Inde, il fait beaucoup plus, il fait 35 degrés TW, ce qui est invivable.
C’est le maximum que le corps peut supporter
“Invivable” au sens propre, ce n’est pas une expression. Une étude de la société de physiologie américaine publiée en janvier dernier conclut que 35 degrés TW, c’est le maximum que le corps peut supporter. Parce que c’est le seuil à partir duquel il n’est plus régulé par la transpiration. Un jeune adulte en bonne santé ne peut pas rester à l'extérieur plus de six heures lorsque l’on atteint ces températures associées à ce niveau d’humidité.
Et c’est donc ce qui se passe en ce moment. Le Huffington Post décrit le phénomène en expliquant que l’on peut désormais littéralement “mourir de chaud” sur terre.
Ce ne sont pourtant pas les records de chaleur qui sont battus. Des températures de 56 degrés ont déjà été mesurées dans la vallée de la mort en Californie, ou même de 58 degrés en Libye en 1922. D’autres records ont été enregistrés en Ethiopie, mais on parle là, de régions très sèches et désertiques. En Inde, ce sont des zones humides et surpeuplées. Et donc ce sont des centaines de millions de personnes qui subissent actuellement cette canicule.
L'État du Rajasthan, au nord-ouest de l’Inde, un des plus touchés actuellement à une population supérieure à celle de la France, 70 millions d'habitants. Il pourrait à terme devenir totalement invivable pour l’homme.
Un air très pollué
Les experts du climat estiment que les vagues de chaleur seront de plus en plus nombreuses à l’avenir. L'Imperial College de Londres explique que ces très fortes canicules en Inde n'intervenaient en moyenne qu’une fois tous les 50 ans. Bientôt, on les subira une fois tous les quatre ans.
La correspondante du Monde à New Delhi raconte que déjà, une partie des terres au Rajasthan ne sont plus exploitables et que les paysans sont obligés de migrer. C’est ce que l’on appelle les réfugiés climatiques, l'avant-garde des futurs et inévitables mouvements de populations qui fuiront les chaleurs.
Les conséquences pour les Indiens sont déjà désastreuses. Il y a la question de rendements agricoles, mais il faut aussi imaginer ce qui se passe dans les grandes villes comme New Delhi. 32 millions d’habitants viennent de vivre le mois d’avril le plus chaud depuis l’existence des relevés. La canicule s’accompagne d'une terrible détérioration de la qualité de l’air. Deux énormes décharges à ciel ouvert ont pris feu et les incendies produisent un air âcre qui pique les yeux.
La chaleur entraîne aussi une forte augmentation de la demande en électricité pour les climatiseurs. Et l’Inde commence à manquer de charbon pour faire fonctionner ses centrales. D'où des coupures d'électricité qui entraînent des coupures d’eau.
La chaleur provoque de la pollution, la pollution provoque la chaleur… C'est un engrenage qui provoque le cauchemar climatique.