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De la Syrie à la France, en passant par la Suède: le parcours de l’assaillant d’Annecy

Dans "Apolline Matin" ce vendredi sur RMC et RMC Story, Nicolas Poincaré se penche sur l’itinéraire du Syrien qui a blessé au couteau quatre enfants et deux adultes la veille dans un parc d’Annecy.

L’homme qui a attaqué des enfants au couteau ce jeudi à Annecy est un Syrien de 31 ans, qui était en France depuis octobre dernier. Et ces dernières semaines, il vivait comme un SDF. Il dormait dans un hall d’immeuble sur un carton et passait ses journées dans le parc du Pâquier, là où il a sévi. Des parents et un vigile l’avaient repéré. Il était “bizarre”, solitaire et silencieux… Il ne faisait l’objet d’aucune fiche de police, n’avait pas été repéré par les services de renseignements. En fait, il était en règle, puisqu’il avait obtenu le droit d’asile en Suède, ce qui lui donnait le droit de circuler en Europe.

Arrivé à Annecy, il avait déposé fin octobre une demande d’asile en France. Il avait aussi fait une demande en Suisse et en Italie. Ce qui n’a pas de sens puisqu’on ne peut pas être réfugié dans plusieurs pays européens en même temps. Et c’est pour cette raison que sa demande en France a logiquement été rejetée le 26 avril dernier. Cette réponse négative lui a été notifiée par mail dimanche dernier, quatre jours seulement avant son passage à l’acte.

Ce même dimanche, il a fait l’objet d’une main courante pour s'être lavé dans le lac d’Annecy. Mais il n’a pas été inquiété, puisqu’il était en situation régulière.

Avant son arrivée en France, il vivait en Suède, depuis dix ans. Il s’y était marié avec une femme de nationalité suédoise, originaire du Moyen-Orient. Une femme de 26 ans qu’il avait rencontrée il y a cinq ans, lors d’un séjour en Turquie. Ensemble, ils avaient une petite fille de 3 ans. Il avait tenté de faire des études d’infirmier par correspondance et avait commencé à apprendre le suédois et l’anglais.

A plusieurs reprises, depuis 2017, il a tenté d’obtenir la nationalité suédoise. Sans succès. Et d’après sa femme, c’est à cause de cet échec qu’il a décidé de quitter le pays pour venir en France. Elle n’a pas voulu le suivre et ils ont donc divorcé. Ils n'avaient presque plus de contact depuis. Sa mère, qui vit aux Etats-Unis, a indiqué qu’il était très déprimé lorsqu’il vivait en Suède, refusant la plupart du temps de sortir de chez lui ou de travailler.

De très nombreux réfugiés syriens accueillis en Suède

Il a fait partie des centaines de milliers de Syriens qui se sont réfugiés en Suède au début des années 2010, au début de la guerre en Syrie, et ils ont d’abord été accueillis à bras ouverts. Ils sont vite devenus la première communauté étrangère du pays. Il y a des villes près de Stockholm où les Syriens représentent aujourd’hui plus d’un tiers de la population.

Seulement, la politique du pays vis-à-vis des immigrés s’est progressivement durcie. Et ces dernières années, le pays n’accorde plus la nationalité ou le statut de réfugié qu’au compte-goutte. C’est peut-être la raison pour laquelle l’homme d’Annecy a quitté le pays.

Avant d'arriver en Suède, il avait quitté la Syrie à l'âge de 21 ans. Il venait du nord du pays, de la région d’al-Hassake, où vivaient de très importantes communautés chrétiennes, des Assyriens et des Araméens. En 2013, lorsqu’il est parti, la ville était attaquée à la fois par les kurdes et par les islamistes de Daesh. Et c’est la menace de l’état islamiste qui a provoqué un exode massif des chrétiens de la région vers l’Europe et vers la Suède en particulier.

L’homme qui a poignardé ces enfants à Annecy était lui-même chrétien de toute évidence. Il se prénomme Abdalmassih, un prénom chrétien qui signifie “serviteur du messie”. Son nom de famille est également un nom très courant des chrétiens en Syrie et au Liban.

Ce jeudi, dans le parc, il a affiché sa religion de façon ostentatoire, en criant “au nom de Jésus Christ” et en embrassant une croix qu’il portait autour du cou. On a aussi retrouvé sur lui un petit livre de prière.

Nicolas Poincaré