"Où sont ces 1.200 actes antisémites en France?": l’imam Abdelali Mamoun réclame "des éléments"

Diriez-vous qu’il y a une explosion des actes antisémites en France? C’est la question qu’a posée Apolline de Malherbe ce mardi sur RMC à Abdelali Mamoun, imam de la Grande Mosquée de Paris, qui n'était pas à la marche contre l'antisémitisme dimanche. "Je n’en sais rien", a-t-il répondu, en réclamant des "éléments concrets" sur ces actes antisémites. Selon le ministre de l’Intérieur, depuis le 7 octobre et jusqu’au 10 novembre, il y a eu plus de 1.247 incidents antisémites en France (1.518 selon le dernier bilan de Gérald Darmanin ce mardi matin). Un total de 330 enquêtes ont été ouvertes en France par la justice, et 571 personnes interpellées.
"Pourquoi on n’en parle pas de ces actes antisémites? Où sont ces 1.200 actes antisémites qu’il y a en France? J’aimerais bien qu’on les dévoile, pour que nous puissions être véritablement solidaires et sensibles à cette question, explique l’imam Abdelali Mamoun. Je ne dis pas que les chiffres sont faux, mais ils ne sont pas dévoilés, apparents. J’aurais voulu qu’on dise que telle synagogue ou tel cimetière a été profané, que tel individu de confession juive a été agressé ou a subi des menaces."
"On n’a pas suffisamment d’informations qui clarifient la question de tous ces actes antisémites"
A-t-il un doute sur ces chiffres? "Je ne dis pas ça, assure-t-il. Je dis que pour que les musulmans de France soient sensibles à cette question, ne nous contentons pas de chiffres. Nous aimerions avoir des éléments concrets. On nous a parlé des étoiles de David (taguées à Paris et en région parisienne, NDLR), ça n’a rien à voir avec les musulmans. On veut nous parler d’antisémitisme musulman et c’est ce que nous voulons condamner. Aujourd’hui, l’immense majorité de la composante musulmane aspire à vivre en paix avec le reste de la communauté nationale et en particulier avec la communauté juive de France. Les relations sont très cordiales."
"Je ne demande pas des preuves, je demande des éléments, ajoute Abdelali Mamoun. "On n’a pas suffisamment d’informations qui clarifient la question de tous ces actes antisémites. On nous donne ces chiffres mais on ne nous explique pas ce qu’il y a."
Relancé sur les premières condamnations et l’interpellation de huit mineurs par exemple pour des chants antisémites dans le métro à Paris, l’imam de la Grande Mosquée de Paris "condamne avec fermeté" ces actes et leurs auteurs "sans aucune réserve". "Ils méritent, ces jeunes-là, d’être rappelés à l’ordre, explique-t-il à propos de l’affaire du métro. Ce sont des enfants. Ils sont dans une attitude puérile, ils ne se rendent pas compte de la gravité de ce qu’ils font. Il faut relativiser. Je n’excuse pas, j’explique simplement qu’il y a des comportements qui émanent de personnes responsables, qui ont toute leur tête, et d’autres qui émanent de jeunes qui sont dans la provocation, dans le jeu."
"Je dis qu’il existe aussi de l’islamophobie, des actes anti-musulmans qui sont tout autant détestables, et dont les musulmans sont victimes", ajoute l’imam, qui dénonce par ailleurs les "crimes de guerre" du Hamas et d’Israël.
"Une succession de crimes de guerre"
"Le Hamas, ce ne sont pas gens qui ont été parachutés à Gaza, explique Abdelali Mamoun. Ce sont des Gazaouis eux-mêmes, des Palestiniens élus par les Palestiniens. Ils ont été choisis par la population de Gaza pour défendre ses intérêts. Ils ont jugé, bêtement et de manière criminelle, et je condamne fermement les exactions qu’ils ont commises le 7 octobre, que pour pouvoir réveiller l’opinion internationale sur le sort que subit Gaza, il fallait aller tuer… C’est leur réflexion, ils se sont dit que c’était le seul moyen pour réveiller les consciences internationales, et ils ont réussi." Une attaque terroriste du Hamas qui a fait 1.200 morts sur le sol israélien.
"A partir du moment où on terrorise, où on tue des gens, c’est bien sûr du terrorisme, poursuit-il. Mais ce que fait l’armée (israélienne) quand elle bombarde et tue 11.000 personnes, vous appelez ça comment? (…) Dans le droit international, le terme terrorisme n’existe pas. Il y a des crimes de guerre qui ont été d’abord commis par Israël à l’égard du blocus et de la prison à ciel ouvert à Gaza. En contrepartie, le Hamas a commis un crime de guerre contre la population israélienne. Et en contrepartie encore une fois, l’armée israélienne a aussi commis un crime de guerre. C’est une succession de crimes de guerre."
La Grande Mosquée de Paris "s'inscrit en faux" après les propos d'Abdelali Mamoun
Dans un communiqué, la Grande Mosquée de Paris a assuré dans un communiqué "s'inscrire en faux" après les propos d'Abdelali Mamoun sur RMC. "À la suite de cette émission, je me suis entretenu avec Abdelali Mamoun. Ce dernier m’a affirmé 'son regret d’avoir été très confus' alors qu’il n’entendait pas 'remettre en cause les chiffres alarmants des actes antisémites en France', indique Chems-eddine Hafiz, le recteur de la Grande Mosquée de Paris.
"Contrairement aux propos en question, la Grande Mosquée de Paris ne nie pas, ne minimise pas et ne relativise pas l’ensemble des actes antisémites survenus en France ces dernières semaines, et a une confiance totale dans les chiffres diffusés par le ministère de l’Intérieur et des Outre-mer. Elle déplore vivement la recrudescence des actes antisémites et la condamne totalement. Par son histoire, par son identité et par le message qu’elle porte aujourd’hui, la Grande Mosquée de Paris réaffirme son engagement entier dans la lutte contre l’antisémitisme et contre toute autre forme de racisme. Elle continuera à défendre la fraternité religieuse au sein de notre communauté nationale."