Ce sera extrêmement compliqué pour les proches de Philippot de garder leur poste au FN

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David Masson-Weyl, élu avec le soutien du FN au Conseil régional du Grand-Est, a fondé le FN Sciences Po. Proche de Florian Philippot, il a aussi présidé le collectif Marianne, think-tank frontiste dédié aux questions d'éducation.
"On pressentait le départ de Florian Philippot depuis plusieurs semaines, voire plusieurs mois, et cela vient clore une séquence médiatique et politique qui dure depuis les élections.
Certains au Front national ont voulu expurger cette séquence un peu négative en faisant en sorte que Florian parte. Il était depuis longtemps la cible de plusieurs conseillers et de personnes gravitant dans l'entourage de Marine Le Pen et qui, jusqu'à présent, n'arrivaient pas à leurs fins.
Marine et Florian étaient pourtant - et sont toujours - sur la même ligne politique. Mais cet entourage a profité de l'échec de la présidentielle pour tenter un coup politique. Sur le plan idéologique, ils n'étaient pas satisfaits de l'évolution du FN, qui évoluait vers un parti de gouvernement grâce au travail cumulé de Florian et de Marine, avec davantage de travail de fond et de structuration.
"On est nombreux à être venus dans le sillage de Philippot"
Par sa formation académique, ses qualités propres, sa culture de l'administration, du travail, Florian a charpenté l'organisation du parti, monté des groupes de travail, des collectifs (comme le collectif Marianne pour les étudiants ou le collectif Racine pour les enseignants), et porté la parole du FN dans les médias.
On est un certain nombre à être venus dans son sillage, tout à fait en accord avec cette ligne de dédiabolisation, qui tentait de modifier le discours sur Front sur le fond comme sur la forme, en modérant et nuançant davantage les choses.
"Certains partent, quitte à perdre des postes"
Il a donc attiré derrière lui toute une vague de gens diplômés, venant d'universités, de grandes écoles, qui avaient des compétences nouvelles. Des personnes comme Kévin Pfeffer (assistant parlementaire de la députée Sophie Montel, qui a démissionné du parti), Aloïs Navarro...
Maintenant, chacun est libre. Certains ont la liberté et le courage de partir -comme l'économiste Philippe Murer - quitte à perdre des postes d'assistant parlementaire. Je crois néanmoins que ce serait extrêmement compliqué pour les proches de Florian Philippot de garder maintenant leur poste au sein du parti. Et à leur place, je ne me sentirais pas à l'aise (David Masson-Weyl n'est pas formellement encarté au parti).
"Marine [Le Pen] s'est laissée abuser"
La ligne de Florian consistait à dire qu'on est des gens raisonnables, pas des extrémistes. En clair: on débat avec nos adversaires politiques, et en même temps, on reste intraitables sur la souveraineté nationale. On trouve cette patte dès les premiers discours de Marine Le Pen.
A côté, au FN, il y a des gens qui n'en ont rien à faire de la souveraineté. Qui ont une obsession: de dire, en clair, qu'il y a trop de Noirs et d'Arabes en France. Ils l'ont longtemps mise en sourdine et tentent aujourd'hui un coup politique. Marine s'est laissée abuser et je le regrette profondément.
"Certains ont toujours oeuvré contre Florian Philippot"
Ces gens ont toujours oeuvré contre Florian Philippot. Ils se disent que ce parti n'arriverait jamais à rien, qu'il ne sert à rien de devenir majoritaire, et qu'il est plus facile de se resserrer sur les thématiques traditionnelles, l'immigration, la sécurité, l'islam, parce qu'ils pensent avoir une rente électorale sur ce sujet, qui leur permet de vivre.
J'y inclus Louis Aliot. Je ne l'attaque pas à titre personnel. Il est là depuis très longtemps. Lors de la séquence d'exclusion de Jean-Marie Le Pen, il était très opposé à son exclusion, comme d'anciens mégrétistes qui n'ont pas quitté le parti lors de la scission de 1998 et qui pourraient se coaliser contre cette ligne.
"La base militante peut être très mal à l'aise"
Outre les jeunes diplômés, il ne faut pas oublier la base militante du FN qui peut être très mal à l'aise devant ce spectacle. Quand nous avons lancé le FN Sciences Po, certains nous ont contacté pour nous dire leur fierté de voir leur parti défendu dans une grande école. C'est une base militante souvent méprisée par les médias, traités de racistes, de fachos... Florian, qui a amené une vraie normalisation, leur a permis de se dire qu'ils sont des Français comme les autres.
Tout cela est mauvais signe pour Marine Le Pen parce que, honnêtement, un grand nombre de cadres s'emploie à le défendre. A chaque fois, dès que Florian est visé, c'est Marine qui est visée. Et j'ai peur qu'elle ne soit la prochaine victime."