Dessin de Coco: la remarque de Sophia Chikirou est "abjecte" pour Riss, directeur de Charlie Hebdo

Neuf ans après l'attentat de Charlie Hebdo, Coco, dessinatrice prise en otage par les frères Kouachi lors de l'attaque terroriste contre le journal satirique le 7 janvier 2015, est de nouveau la cible de menaces. La raison? Un dessin satirique évoquant la famine à Gaza et le ramadan paru dans Libération.
Le dessin montre un enfant palestinien affamé poursuivre un rat pour, semble-t-il, se nourrir, avant que sa mère ne le retienne en lui rappelant qu'en raison du ramadan, il faut attendre le coucher du soleil pour manger.
"Rien n'a changé, la situation s'est aggravée", déplore Riss, le directeur de la rédaction de Charlie Hebdo, ce jeudi sur RMC et BFMTV. "Depuis 2015, les choses se sont désinhibées, les gens ne sont pas gênés pour envoyer des menaces de mort, d'insulter et de dénigrer sur les réseaux sociaux". Et pas question de s'arrêter malgré les menaces.
"Il ne faut pas se laisser impressionner. Ça renforce notre détermination à continuer de dessiner l'actualité de manière satirique. Nous ferons encore de tels dessins, il ne faut pas se laisser impressionner par ces gens-là. Coco est courageuse et déterminée".
"Des partis politiques qui sont sans foi ni loi"
Le dessin de Coco lui a même valu des réactions politiques outrées. À commencer par la députée La France insoumise Sophia Chikirou: "Vous n'aurez pas notre haine mais vous la méritez", a répondu l'élue à la dessinatrice, reprenant à son compte une partie d'une phrase de rescapés du Bataclan.
"Cette remarque est abjecte", estime Riss. "Elle s'approprie la parole des victimes d'un attentat, ça montre le cynisme et l'odieux de cette déclaration". Pour le directeur de la rédaction de Charlie Hebdo, les propos de Sophia Chikirou s'inscrivent dans "du populisme communautariste, du poujadisme communautarisme".
Pour lui, La France insoumise a "une stratégie assumée" d'aller vers les quartiers populaires et la communauté musulmane. "C'est curieux de ne parler qu'à une partie des Français, normalement on défend l'intérêt général. On est dans du clientélisme médiocre", ajoute-t-il.
"Il y a des partis politiques qui sont sans foi ni loi, qui n'ont pas d'éthique et n'ont pas un minimum de morale politique pour défendre leurs idées. Ils sont prêts à utiliser n'importe quoi, y compris de s'en prendre à une dessinatrice qui ne fait de mal à personne", tacle Riss.
Une génération de gauche "pas à la hauteur"
Riss assure avoir "beaucoup de regrets" en comparant la classe politique actuelle, notamment à gauche. "Il y a une médiocrité de la classe politique à gauche. On défend des valeurs de manière infâme, salement, et salissant leurs valeurs. Il y a une fascination pour la radicalité à penser que seule la radicalité fait exister dans l'espace médiatique", ajoute le directeur de la rédaction de Charlie Hebdo.
Malgré les attaques, Riss ne veut pas partager le pessimisme général. Confiant, il garde l'espoir de voir un jour "émerger des personnalités politiques plus exigeantes sur le plan des idées et de l'éthique politique".
"Cette génération de responsables politiques qui prétend être de gauche n’est pas à la hauteur des enjeux historiques. Et j’espère que cela va créer une génération plus audacieuse qui balaiera celle en poste", souhaite-t-il.