RMC
Politique

Salon de l’Agriculture: quand les hommes politiques jouent la carte de la ruralité

Emmanuel Macron au salon de l'Agriculture le 24 février 2024

Emmanuel Macron au salon de l'Agriculture le 24 février 2024 - Lewis Joly / POOL / AFP

Le Salon de l’Agriculture a ouvert ses portes. Emmanuel Macron y était samedi, Jordan Bardella dimanche, et lundi, c’est au tour de François Bayrou. Et pour l’écrivain Arthur Chevallier, le salon de l’agriculture, c’est l’occasion pour les hommes politiques de montrer qu’ils sont du côté du peuple.

Le Salon de l’Agriculture, c’est une comédie. Le temps d’une journée, les ministres essayent de passer pour des personnes normales. Ils mangent du saucisson, ils tâtent le cul des vaches et ils enchaînent les pintes de bière. Tout le monde sait qu’ils font semblant, mais ce n'est pas grave. On veut quand même qu’ils le fassent bien, c’est une preuve de leur implication.

Quel était le but du Salon de l’Agriculture à l’origine?

C’était de mettre en valeur les provinces. L’ancêtre du salon de l’agriculture, c’étaient les concours agricoles privées. Le but, c'était de récompenser les plus belles bêtes. Et au XIXe siècle, sous le règne de Napoléon III, l’agriculture devient une priorité nationale. Donc, on met le paquet. Et en 1855, on crée le Salon des animaux reproducteurs. Ça va avoir un succès fou. La première édition rassemble près de 80.000 personnes. Ça devient ensuite le Concours général agricole, c’est-à-dire l’ancêtre de notre salon de l’agriculture.

Et ça ne concernait que les animaux au début. Mais on ajoute ensuite d’autres productions, comme le miel ou le vin. Ça rassemble toujours plus de monde. Et en 1903, on transforme ce concours général en Semaine agricole. Ça prend une nouvelle dimension. À partir de 1925, l’événement a lieu au Parc des expositions de la porte de Versailles, comme aujourd’hui. Et en 1964, le général de Gaulle crée donc le salon international de l’Agriculture. Là, ça rassemble tout: les bêtes, les savoir-faire, les produits.

Jacques Chirac, le roi du Salon

Et à partir là, ça va devenir un passage obligé pour tous les présidents. Le général de Gaulle, Georges Pompidou et Valéry Giscard d’Estaing iront admirer les bovins et trinquer avec des agriculteurs. Mais une exception quand même: François Mitterrand. Il ne s’y est jamais rendu comme président en 14 ans de mandat. Mais personne ne fera aussi bien que Jacques Chirac. C’est le prince du Salon de l’Agriculture. Il y passe des heures, s’arrête à tous les stands, boit tout, mange tout, discute avec tout le monde. Depuis, ils essayent tous de l’imiter, sans jamais l’égaler. Même si le recors de présence sur le salon est détenu par Emmanuel Macron. Il y passe 14 heures d’affilée en 2019.

Mais est-ce si rentable que ça politiquement? La réponse est oui, et ça s’explique par la particularité de la France. Il y a toujours eu une fracture entre Paris et les provinces. Les campagnes se sont toujours senties méprisées. Le Salon de l’Agriculture, c’est justement le moment où ces deux mondes se retrouvent. Si un président ne se montre pas à l’aise pendant le salon, ça renvoie une mauvaise image. Celle d’un homme qui ne connaît rien ni à son pays ni à ses traditions. Et en général, ça ne pardonne pas.

Arthur Chevallier