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Sursis, aménagement des peines… Darmanin détaille son projet de réforme du système judiciaire

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Gérald Darmanin a envoyé à tous les groupes parlementaires les mesures qu'il souhaite inscrire dans son projet de réforme du système judiciaire. Parmi les plus fortes: un sursis simple pour les primo-délinquants ou le retour du principe d'aménagement obligatoire de certaines peines.

Place à sa "révolution pénale". Le ministre de la justice Gérald Darmanin a présenté ce lundi les contours de son projet de loi "SURE" qui doit assurer une Sanction Rapide, Utile et Effective. Une réforme du système judiciaire pour restaurer la confiance des citoyens.

D'après un sondage Elabe pour BFMTV d'octobre 2023, 61% des Français se disent inquiets pour leur sécurité, 21% disent ne "pas du tout" faire confiance dans le système judiciaire et 40% ne "pas vraiment" lui faire confiance.

Sursis simple pour les primo-délinquants

Face à la presse, le ministre a détaillé les dix articles de ce projet de loi "court et efficace" qu'il veut présenter à l'automne en Conseil des ministres, après avoir saisi en septembre le Conseil d'État pour avis.

Parmi ses propositions envoyées aux groupes parlementaires, Gerald Darmanin souhaite notamment instaurer un sursis simple pour les primo-délinquants, réinstaurer le principe d'aménagement obligatoire des peines ou encore la mutiplication des cours criminelles sans jurés.

Les juges ne sont pas laxistes, mais le système l'est devenu

Selon lui, la France fait face à une situation complexe. "Il n'y a jamais eu autant de peines de prison", explique le ministre de la justice, alors "qu'une peine sur deux n'est jamais effectuée parce qu'elle est aménagée directement après le prononcé du tribunal". "Les juge ne sont pas laxistes, mais le système l'est devenu", ajoute-t-il.

Le garde des Sceaux a cependant décidé quelques ajustements par rapport à ses plans initiaux. Il avait annoncé vouloir supprimer le sursis pour le remplacer par une peine de probation. Finalement, le nordiste espère un "sursis simple aux seules personnes au casier judiciaire vierge". En d'autres termes, cette idée vise les primo-délinquants.

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D'un autre côté, les sanctions seront durcies pour les personnes qui ont déjà un casier judiciaire. Ils seront directement condamnés à une peine. "Vous pouvez être condamné à un bracelet électronique, c'est pas forcément de la prison ferme", a précisé Gérald Darmanin. En plus de cela, le sursis ne sera plus possible au-delà de deux ans d'emprisonnement.

On fabrique de la surpopulation carcérale

Fin de l'aménagement obligatoire des peines

Autre point important, le ministre souhaite revenir sur le principe d'aménagement obligatoire des peines d'emprisonnement. Depuis la réforme dite Belloubet de 2020, une peine de prison ferme est aménageable jusqu'à un an. "Les aménagements de peine obligatoires ont poussé les magistrats à augmenter le quantum des peines" pour s'assurer qu'elles soient bien exécutées, a assuré M. Darmanin. "On fabrique de la surpopulation carcérale". D'après les chiffres, le quantum moyen de peine de prison est passé de sept mois dans les années 80 à quasiment onze mois en 2024.

Selon le projet de loi, le juge qui prononcera la peine aura la liberté d'aménager jusqu'à deux années d'emprisonnement prononcés. En revanche, le juge d'application des peines ne pourra ensuite modifier la peine prononcée par la juridiction.

Gérald Darmanin prévoit également de rétablir les peines de moins d'un mois d'emprisonnement ferme, qui avaient été supprimées par l'ex-ministre Nicole Belloubet, et d'assurer l'incarcération en cas de non-paiement des peines de jours-amende.

La philosophie de cette réforme est d'aller plus loin dans le tout-carcéral, selon Justine Probst

Le garde des Sceaux espère l'extension de la procédure de plaider coupagne, aujourd'hui possible pour certains délits, aux crimes, à la conditions que la victime soit d'accord. Enfin, l'homme de 42 ans veut multiplier le nombre de cours criminelles départementales qui pouraient aussi avoir de plus large prérogative.

"La philosophie de cette réforme est d'aller plus loin dans le tout-carcéral", a commenté auprès de l'AFP Justine Probst, secrétaire nationale du Syndicat de la magistrature (SM, classé à gauche), sceptique sur la capacité de cette réforme à enrayer la surpopulation carcérale. "On constate la disparition d'un certain nombre de mécanismes qui permettaient l'individualisation de la peine", a-t-elle aussi déploré. Cette réforme s'annonce difficile à faire voter et le ministre a reconnu ce "risque".

Tao Chardel avec AFP