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Disparition de Maëlys: "Si on a trop peur pour son enfant, il va reprendre cette peur à son compte"

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Les enfants ne sont pas hermétiques à l'actualité: ils sont certainement nombreux à avoir entendu parler de la disparition de la petite Maëlys. Chez les parents, difficile d'aborder la question du risque d'enlèvement avec leur enfant. La pédopsychiatre Fanny Cohen-Herlem leur donne les clés pour discuter avec leur progéniture en toute confiance.

Dr Fanny Cohen-Herlem, pédopsychiatre et psychanalyste à Paris. Auteur de plusieurs ouvrages dont Le divorce, comment répondre aux questions des enfants? ou L'adoption, comment répondre aux questions des enfants? (éd. Pascal).

"Les risques d'enlèvement, on peut en parler avec eux s'ils posent des questions. On n'est pas obligé de les inquiéter d'emblée, mais à partir du moment où ils vont seuls à l'école, ou au jardin par exemple, il faut pouvoir les mettre en garde. De toute façon, on a tellement parlé de la disparition de Maëlys qu'il serait étonnant qu'il y ait beaucoup d'enfants qui ne soient pas au courant.

"Il vaut mieux attendre qu'ils posent la question"

Une telle disparition ne peut que les inquiéter, d'autant plus que c'était pendant un mariage, avec la présence des parents. Encore une fois, il vaut mieux attendre qu'ils posent la question. On peut leur dire que si les adultes sont plutôt bienveillants et qu'ils sont entourés de gens qui prennent soin d'eux, il existe toutefois des gens qui ne sont pas gentils et qui ne respectent pas les enfants, et ceux-là il faut apprendre à s'en méfier.

Il existe sur Internet un 'permis de prudence', qui donne des éléments très précis aux enfants. Il y a trois choses que l'enfant doit se dire si un adulte vient vers lui pour lui proposer quelque chose. D'abord: 'est-ce que j'ai envie de faire ce qu'il me propose, comme monter en voiture, aller voir des chats, aider à porter un paquet, l'accompagner à l'endroit où il veut aller et qu'il ne sait pas rejoindre'? La deuxième question c'est: 'est-ce que mes parents vont savoir où je suis?'. Et la troisième question c'est: 'si j'ai besoin d'aide, est-ce qu'il va y avoir quelqu'un pour m'aider?'. C'est aussi pour leur expliquer qu'on ne peut pas répondre de façon positive à toutes les personnes, même si elles ont l'air très gentilles.

"Il ne s'agit pas de les empêcher de faire des choses"

Il y a plusieurs recommandations à faire à l'enfant. Quand on est dans un lieu où il y a beaucoup de monde, il faut que ses parents puissent toujours l'avoir sous les yeux, et que s'il veut s'éloigner il doit toujours dire où il va et avec qui. Des choses très simples: 'tu es encore très jeune, tu peux marcher devant ou aller jouer plus loin, mais il faut que je puisse te voir'. Ou: 'si tu vas aller jouer avec un copain, tu dois d'abord me le demander et me dire qui c'est et que je sache où tu es'. Il ne s'agit pas de les empêcher de faire des choses, mais simplement, c'est normal à leur âge de ne pas pouvoir tout faire et qu'un adulte puisse veiller sur eux.

Ce qui est très important, c'est de faire confiance à son enfant. Il faut le prévenir des dangers normaux de l'extérieur, mais lui montrer aussi qu'on lui fait confiance. La confiance que l'on a en son enfant est quelque chose qui le rassure et le rend fort, et qui lui permet de réfléchir. Si on a trop peur pour lui, il va reprendre à son compte cette peur des parents. Il ne se sent alors pas du coup en sécurité."

Propos recueillis par Philippe Gril