"L'enfant est roi": les profs dénoncent des tensions de plus en plus fortes avec les parents d'élèves

A l'école, les relations entre les enseignants et les parents d'élèves se dégradent. Selon le rapport annuel de la médiatrice de l'Éducation nationale publié ce mercredi, parmi les 23.700 saisines reçues en 2024, les trois-quarts proviennent des familles. L’ensemble des sollicitations sont en hausse de 16% en un an (contre +6% en 2022), notamment à cause des conflits parents-profs qui se multiplient. Un synonyme d’une défiance grandissante envers l’institution.
Parmi ces saisines, 40% des réclamations des familles concernent la vie quotidienne des établissements. En particulier des conflits entre parents et profs et des contestations de notes ou de sanctions.
Des dépôts de plainte contre de mauvaises notes
Catherine enseigne dans un lycée professionnel en région parisienne: "J'ai déjà eu un mail de parents qui estimaient que la punition que j'avais donnée n'avait pas lieu d'être et que l'enfant ne viendrait pas la faire comme l'avaient décidé les parents", raconte-t-elle sur RMC. "En termes de légitimité par rapport à l'enfant, ça pose problème vis à vis de nous".
Et dans le collège d’Isabelle, cette année, une mère mécontente de la notation d’une prof est allée très loin: "Elle a poussé des hurlements à l'administration, tout le monde est sorti voir ce qu'il se passait. Elle a fini au commissariat à porter plainte contre cette enseignante. La police lui a dit que ça n'avait aucun sens mais a dû prendre sa plainte et l'enseignante a dû se défendre en posant une main courante. Cela n'a plus aucun sens", déplore-t-elle.
Une dégradation des relations qui auraient plusieurs explications: "C'est depuis la réforme du bac alors que maintenant 40% de la note repose sur le contrôle continu", constate ce vendredi sur RMC Story Sabrina, professeur d'éco-gestion dans un lycée de Seine-Saint-Denis. "Et il y a Parcoursup qui est très angoissé pour les élèves et les familles et on tient les profs pour responsable de la réussite de l'élève et son orientation sur Parcoursup", ajoute-t-elle.
Des parents intrusifs qui ne croient que la "parole d'évangile" de leurs enfants
Autre point, des changements de mentalité chez les parents: "On a une nouvelle génération de parents très intrusifs avec des enfants rois dont la parole est d'évangile", constate Sabrina. "Les parents sont très procéduriers, contestent tout,
Les réseaux sociaux ont aussi un rôle: "Il y a un discours ambiant qui n'aide pas les enseignants: ils sont soit disant toujours en grève ou en vacances, les parents se montent le bourrichon les uns les autres sur les réseaux sociaux. Quand un enfant entend ce genre de discours autour de lui, il n'a pas de filtre, pourquoi il nous respecterait?".
Pronote, une "charge mentale" supplémentaire pour les profs
Enfin, le logiciel Pronote, qui permet aux parents de voir les notes et les appréciations directement sur leur téléphone et contacter l'enseignant par mail, a changé les relations avec les profs: "Avant, un parent devait appeler l'établissement, passer par le CPE et le secrétariat. Aujourd'hui, l'élève a une mauvaise note, le parent vous envoie un mail assassin et demande à revoir la note. C'est bien cette fluidité avec les parents mais ça nous fait une charge mentale en plus", déplore Sabrina.
D’après le rapport de la médiatrice, ce genre de contestations concerne surtout les collèges et les lycées. Mais depuis quelques années, les sollicitations des parents d’élèves en primaire sont de plus en plus nombreuses. Dans le détail, les réclamations Hausse de 50% en 5 ans. 49% viennent du 2ème degré public, 23% de l'enseignement supérieur public, 17% du 1er degré public et 12% d'établissements privés.