"Le harcèlement à l'école se poursuit en ligne": faut-il interdire les smartphones aux moins de 13 ans?

Les affaires de harcèlement à l'école se multiplient en France et dans le monde. Avec très souvent le constat que les réseaux sociaux ont joué un rôle néfaste dans le développement des faits. C'est le cas dans l'affaire Lindsay, particulièrement médiatisée ces dernières semaines.
La jeune fille de 13 ans s'est donnée la mort le 12 mai dernier après avoir été victime de harcèlement scolaire. Sa famille a déposé une plainte visant Facebook et Instagram "complètement défaillants" en matière de modération et de lutte contre "les propos haineux" selon l'avocat de la famille, dénonçant la poursuite du harcèlement contre Lindsay et la famille... même après la mort de la collégienne.
Si des mesures de renforcement contre la haine en ligne à l'école ont été promises par le ministre de l'Education nationale, Pap Ndiaye, à la suite de cette affaire, faudrait-il aller plus loin? Une ville en Irlande a tenté de remédier à ce problème en interdisant purement et simplement les smartphones pour les moins de 13 ans.
"Il faut rassurer les parents, il y a de plus en plus de maturité chez les jeunes"
A Greystones, au sud de Dublin, la communauté éducative et les parents d'élèves ont réussi à s'accorder sur le fait de ne pas autoriser les enfants à avoir de smartphones avant le collège. "Le plus longtemps on pourra préserver leur innocence, le mieux ce sera", explique une mère interrogée par le quotidien britannique The Guardian.
Car en plus des problèmes liés aux réseaux sociaux, le temps d'écran massif des jeunes peut en effet être néfaste également pour leur développement physique et mental. Tech & Co relaie par exemple une étude des services publics américains qui assurent que les jeunes qui passent plus de deux heures devant un écran chaque jour obtiennent des scores inférieurs aux tests de réflexion et de compétences linguistiques.
"Il n'y a aucun argument qui supposerait que l'on devrait laisser les moins de treize ans avec un smartphone", salue l'économiste Pierre Rondeau dans "Estelle Midi", totalement favorable à ce genre d'initiatives.
"C'est un objet utile si on met des barrières et une discipline"
D'autres comme Julien, auditeur RMC et père d'un jeune de 12 ans, estime qu'il n'y a pas lieu d'interdire, mais que c'est tout simplement une question d'éducation parentale à limiter le temps d'écran des enfants.
"Mon fils n'y a pas accès en libre-service. Le téléphone est interdit au collège. Il le consulte le matin avant l'école, et en fin de journée jusqu'à 19 heures maximum et basta ! C'est un objet utile si on met des barrières et une discipline", explique-t-il.
Samuel Comblez, directeur des opérations de l'association E-enfance, rejoint Julien et estime que l'interdiction aux moins de 13 ans n'est qu'un report du problème à plus tard. Il pense en revanche qu'il faudrait réfléchir à un meilleur accompagnement des parents qui sont parfois en détresse avec l'usage du smartphone par leurs enfants.
"Interdire n'a tellement de sens. En revanche, il faudrait permettre aux parents de mieux comprendre comment les jeunes utilisent leurs écrans. Et les rassurer aussi car tous les enfants ne font pas n'importe quoi: il y a une maturité de plus en plus forte et une conscience des dangers", assure-t-il.
"Le problème du harcèlement, qui pouvait s'arrêter à l'école, se prolonge en ligne sur les réseaux sociaux"
Des principes qui séduisent, mais qui ne correspondent pas à la réalité actuelle des choses, regrette Laurence, professeur d'EPS dans l'Oise.
"On est dans l'utopie complète quand on dit ce genre de choses, cet outil a envahi l'école de manière dingue. Le problème du harcèlement, qui pouvait s'arrêter à l'école, se prolonge en ligne sur les réseaux sociaux", note-t-elle, réclamant plus d'actions de l'Education nationale.