"Peur du basculement": des étudiants juifs ne vont plus en cours à cause de l'antisémitisme

Plus de 800 actes antisémites et 400 interpellations, en France, depuis le 7 octobre. C’est le bilan annoncé par Gérald Darmanin, ce lundi, trois semaines après l’attaque terroriste du Hamas qui a fait 1.400 victimes en Israël puis les bombardements, ainsi que l’intervention terrestre, de l’armée israélienne dans la bande de Gaza. Un contexte qui incite des étudiants juifs à éviter de fréquenter les universités françaises, selon Yossef Murciano, secrétaire national de l’Union des étudiants juifs de France.
"C’est la première fois, depuis le début de mon engagement, et ça fait pas mal de temps que je suis dans le monde étudiant et assez engagé, que j’entends des juifs dire ‘je ne vais pas aller à la fac, je vais attendre que ça passe’, explique-t-il dans Apolline Matin ce mardi sur RMC et RMC Story. Il y a une circonstance de calendrier qui fait que là, c’est les vacances universitaires. Des gens ont décidé de rater une semaine de cours, puis d’avoir une semaine de vacances, et après peut-être ça se calmera quand ils reviendront. On a peur du basculement."
"Dans les universités, il y a à la fois la politisation des gens qui amène à des réflexions qui glissent parfois vers l’antisémitisme, ajoute-t-il. Il y a un slogan qui dit: ‘From the river to the sea’. Cela ne date pas d’hier, ‘la Palestine sera libre’, et ce slogan nie complètement l’existence de l’Etat d’Israël et le droit des juifs à l’autodétermination. Cela a des relents antisémites, mais c’est politique. On glisse vers des gens qui disent ‘le conflit israélo-palestinien, ça m’intéresse, mais je ne le regarde pas à la télé, pas sur RMC ou BFMTV, parce que derrière il y a des juifs qui contrôlent les médias’. Ça, c’est de l’antisémitisme. Ensuite, on a ‘Hitler n’a pas fini son travail’, sur Twitter, un groupe de promo…"
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"Une sorte d’angoisse généralisée depuis le 7 octobre"
Et selon Yossef Murciano, les universités ne sont pas les seuls endroits à être concernés par cette crainte de l’antisémitisme. "Dans les universités, et au-delà aussi, on a des retours, comme l’histoire de Samuel, le président de l’Union des étudiants juifs de France, qui rentre dans un Uber et s’inquiète au téléphone de la situation des juifs de France, raconte-t-il. Le Uber s’arrête et lui demande de descendre. Est-ce que c’est qualifiable d’antisémite? Est-ce que ça veut dire que le chauffeur ne veut pas de juifs dans son Uber? Ou pas de juifs qui se plaignent? On ne sait pas. Mais c’est l’antisémitisme du quotidien que vivent les juifs de France et qui est en forte recrudescence depuis le 7 octobre. Il y a une sorte d’angoisse généralisée depuis le 7 octobre, dans la communauté juive."
"Les gens sont angoissés, c’est sûr, souligne l’étudiant. Ils nous demandent comment faire, quoi faire. J’ai reçu l’appel hier d’une dame de 60 ans qui n’est en lien avec personne, qui n’a visiblement pas de famille, et qui est seule chez elle devant sa télé. Elle se demande juste quoi faire, si elle doit enlever sa mezouza de sa porte ou la laisser. Elle nous demande presque des consignes. Je pense qu’il faut continuer à porter sa kippa, à faire comme on a envie. Cela ne date pas d’aujourd’hui que les juifs enlèvent leur kippa, cachent leur mezouza, enlèvent leur nom de la boite aux lettres… L’antisémitisme existe depuis la nuit des temps. Là, on traverse une crise, c’est augmenté. Ces chiffres, avec plus de 800 actes, c’est une sorte de banalisation de l’antisémitisme. La peur, avec cette banalisation des actes antisémites verbaux, symboliques, c’est: quand est-ce que ça va basculer dans la violence physique?"