Protection de l'enfance: "Nombre de foyers de l'ASE sont des centres de recrutement" pour proxénètes

La protection de l'enfance "qui hier était à bout de souffle" est "aujourd’hui dans le gouffre", a alerté mardi 8 avril la commission d'enquête de l'Assemblée nationale dans son rapport final. Il s'agit du "13e publié [...] depuis 2022", rappelle de son côté Didier Tronche, président de la Cnape, la principale fédération d'associations de protection de l’enfance.
Parallèlement, le journaliste Claude Ardid publie ce mercredi son nouveau livre-enquête La fabrique du malheur: scandales au coeur de l'Aide sociale à l'enfance, paru aux éditions de l'Observatoire.
Des mineures prostituées: "On ne peut rien faire"
"Je ne savais pas ce que j'allais découvrir quand j'ai commencé à enquêter il y a 2 ans. Je suis allé dans la Sarthe, dans l'Oise, à Toulouse, Marseille, Clermont-Ferrand... Au fur et à mesure, je découvrais vraiment l'horreur", relate ce mecredi le grand reporter pour Charlie Hebdo, sur le plateau des Grandes Gueules.
Se basant sur l'exemple de Marseille, Claude Ardid l'affirme: "La plupart des foyers" en France où sont hébergés les mineurs "sont des centres de recrutement" pour les proxénètes. "Passé 22h, il n'y a plus d'éducateurs, il y a un concierge. La directrice sait qu'elles partent. Elle dit qu'on ne peut rien faire". Le journaliste dénonce une "mise en danger de la vie d'autrui". "On voit des jeunes filles habillés avec des vêtements courts monter dans des gros bolides pilotés par des hommes beaucoup plus âgés".
"Le désengagement de l'État est total", alerte Claude Ardid
Le rapport de la commission d'enquête parlementaire préconise une loi de programmation et un renforcement des contrôles. Selon le dernier bilan officiel, 396.900 jeunes sont suivis par la protection de l'enfance en France, compétence des départements depuis les années 80.
Le rapport souhaite par ailleurs créer "une commission de réparation pour les enfants placés qui ont été victimes de maltraitance dans les institutions" et à renforcer le nombre de contrôle, "à raison d'au moins une inspection tous les deux ans" pour les établissements et les assistants familiaux.
Rassemblement le 15 mai
"Il y a tellement de séparations conflictuelles, certains couples font des enfants comme s'ils allaient acheter une pâtisserie à la boulangerie. Ils divorcent avec une telle facilité, les enfants comptent pour du beurre", se désole Claude Ardid. Celui-ci souligne par ailleurs que "la maltraitance dans les familles a augmenté" pendant le covid.
Un rassemblement est prévu le 15 mai à l'appel du "collectif des 400.000" qui réunit une soixantaine d'associations et de fédérations du secteur, pour dénoncer les "promesses non tenues".