Infirmière tuée à Reims: Philippe Juvin veut des peines intermédiaires en cas d'irresponsabilité

Face à la violence contre les soignants, "il faut des lignes claires": tel est le message de Philippe Juvin. Le député LR des Hauts-de-Seine et chef de service aux urgences de l'hôpital européen Georges-Pompidou à Paris, invité de la Matinale Week-End de RMC, souhaite de la fermeté face à ce phénomène qui ne cesse de grandir: "Quand vous touchez une infirmière, quand vous touchez une aide-soignante, quand vous touchez un médecin, le soir, vous dormez en prison."
"Dans tous les hôpitaux, aujourd'hui, il y a des agressions. Ça commence par l'agression verbale, ce qu'on appelle publiquement des 'incivilités'. Et puis ça va jusqu'à l'agression physique", raconte-t-il avant d'avouer avoir lui-même été victime de ce phénomène:
"Je me suis déjà fait agresser. Physiquement. Tous les soignants de France vous le diront, c'est une situation qui explose."
Après le meurtre, lundi, d'une infirmière à Reims par un homme atteint de schizophrénie, Philippe Juvin demande l'application de la loi de 2008 sur l'irresponsabilité pénale afin de mettre en place des peines intermédiaires:
"Il ne peut pas n'y avoir rien et il ne peut pas y avoir une condamnation identique à celle de quelqu'un qui a plein exercice de son libre-arbitre. Il faut quelque chose d'intermédiaire", juge-t-il.
"La psychiatrie française est en crise"
Philippe Juvin pose surtout la question des défaillances du système psychiatrique en France, qu'il estime "très paupérisé". Sur le cas de Reims, il se demande ainsi "comment un homme qui est donc diagnostiqué schizophrène, paranoïaque, suivi depuis les années 80, qui a commis déjà des agressions au couteau en 2017 (a pu) rester libre? On sait qu'il ne prenait plus son traitement depuis plus d'un an. Il a pu préméditer son passage à l'acte.", explique-t-il.
Plus généralement, le député LR juge que "la psychiatrie française est en crise, il n'y a pas suffisamment de moyens. Et puis, il y a une organisation qui en souffre, c'est que dans les services d'urgence en France, il y a un service d'urgence en France sur deux qui n'a pas de psychiatre, qui n'a pas de psychologue: ce n'est pas possible !"
>>> Retrouvez toute la Matinale week-end de RMC en podcast
Doubler le numerus closus
A Julien, infirmier, qui lui explique que "rien n'a été fait (en psychiatrie) depuis 20 ans", Philippe Juvin dénonce le manque de soignants, 500 internes formés en psychiatrie chaque année depuis dix ans, et la baisse du nombre de lit, qui a baissé de 40% en 30 ans:
"C'est évidemment insuffisant. Il faut former beaucoup plus de psychiatres et de médecins en général, doubler le numerus clausus, faciliter le travail des médecins retraités, réfléchir aux médecins étrangers", estime le médecin urgentiste.
"Tous les ministres de la Santé nous disent depuis dix ans que ça va prendre dix ans. Mais on aurait commencé il y a dix ans, le sujet serait différent", cingle-t-il, estimant qu'il faut reprendre ce qui fonctionne comme quand Jacques Chirac avait créé l'Institut national du Cancer: "Il faut, comme le cancer, en faire une grande cause nationale. Il faut faire l'Institut national de la psychiatrie en réunissant la recherche, l'industrie, les soins, les structures et grader tout cela."