Suppression prochaine du pass vaccinal: annonce politique avant la présidentielle ou réalité sanitaire?

Le pass vaccinal pourrait être supprimé plus tôt que prévu. Le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal a émis l'hypothèse de mettre fin au dispositif dès la fin mars ou le début avril. Une date qui n’est pas anodine.
La levée du pass vaccinal pourrait donc intervenir quelques jours seulement avant le premier tour de l'élection présidentielle. Pour l'exécutif, ce serait une heureuse rencontre du calendrier sanitaire et du calendrier politique. Ce serait la levée de toutes les restrictions, de toutes les contraintes, juste avant d’aller voter. Le hasard fait bien les choses.
Le professeur Alain Fischer, qui préside le Conseil d’orientation de la stratégie vaccinale, n'est pas dupe. Il était auditionné mercredi matin au Sénat et il a lâché cette petite phrase: “Il peut y avoir des critères d’ordre politique qui guident les choix qui seront faits”.
Évidemment, il peut y avoir des critères politiques, mais il y a aussi des critères scientifiques. Alain Fischer a expliqué que trois conditions devaient être remplies pour supprimer le pass vaccinal. D’abord, il faut que le taux d'incidence soit divisé par 10 ou par 20. Ensuite, il demande la disparition de la surcharge hospitalière et un retour au fonctionnement normal des hôpitaux. Et enfin, il faut un niveau élevé de rappel vaccinal, c'est-à-dire de Français qui reçoivent une troisième dose.
Selon lui, tout cela peut aller assez vite. La baisse du taux d’incidence pourrait intervenir courant mars et la baisse de la pression hospitalière 15 jours plus tard. Donc effectivement début avril.
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Levée des restrictions en Angleterre et au Danemark
Pourtant aujourd’hui, on est loin d’avoir atteint les objectifs, sur les hospitalisations par exemple. On en est encore à 33.000 patients Covid à l'hôpital, c’est un record. C’est même le chiffre le plus haut depuis le début de l'épidémie, il y a deux ans. Mais le nombre de contaminations baisse fortement et régulièrement depuis le 24 janvier.
L’épidémiologiste Antoine Flahault a fait ses calculs. Le taux d’incidence est divisé par deux toutes les semaines. En six semaines, on pourrait donc repasser sous le seuil d’alerte qui est fixé à 50. Et six semaines, ça nous mène fin mars. La fin de l'épidémie dans moins de deux mois, c’est donc l'hypothèse qui est retenue et elle n’est pas forcément absurde.
Le gouvernement accélère sans doute aussi pour tenir compte de l'exaspération des Français. Mercredi, Gabriel Attal a dit être parfaitement conscient de la lassitude des Français vis-à-vis de l'épidémie. Le gouvernement a reçu une note des services de renseignements territoriaux, sur les convois d'opposants au Pass vaccinal qui veulent converger vers Paris. Les services estiment que ce mouvement n’est pas très structuré, mais qu'il pourrait donner lieu à un nouvel élan de contestation.
Que font nos voisins? D’abord, ils n’ont pas de présidentielle dans deux mois. Donc leurs choix ne sont pas dictés par le calendrier politique. Beaucoup lèvent les restrictions et reviennent sur le pass sanitaire. La Première ministre du Danemark a proclamé le retour à la vie d’avant, et même demandé le retour du sourire. Le pass sanitaire n’est plus exigé au Danemark depuis dix jours alors que c'était le pays européen le plus touché, devant la France.
En Angleterre, le passeport vaccinal, c’est fini aussi. Le port du masque n’est plus obligatoire, même à l'intérieur. En Catalogne, le pass n’est plus demandé pour aller au resto ou dans les salles de sport. Levée aussi de la plupart des mesures de restriction en Suède, en Finlande.
Mais ce n’est pas vrai partout. Le pass sanitaire ou vaccinal est toujours en vigueur en Italie, en Belgique, en Allemagne, aux Pays-Bas. En Italie, les non-vaccinés peuvent être privés d’aide sociale. En Belgique et en Allemagne, on débat encore d’une mesure plus dure que le pass, c'est-à-dire d’une “obligation” vaccinale. Outre-Rhin, le Parlement a commencé l'examen du projet pour une possible entrée en vigueur l’été prochain.
La France, en évoquant la fin du pass vaccinal pour le printemps, se situe donc à mi-chemin entre ceux qui vont très vite, les optimistes, et ceux qui sont plus prudents.