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"Mon fils est mort d’un attentat individuel": Yannick Alléno se bat pour une loi sur l’homicide routier

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Le chef étoilé Yannick Alléno, dont le fils a été tué par un conducteur ivre, se bat pour la création d’un délit d’homicide routier. Il attend qu’un projet de loi soit examiné à l’Assemblée nationale.

Une Ferrari volée par un conducteur alcoolisé, un scooter percuté en plein Paris, et un terrible drame. Antoine Alléno est mort le 8 mai 2022, à l’âge de 24 ans. Victime d’un chauffard du même âge. Depuis un an et demi, son père, le chef étoilé Yannick Alléno, se bat pour la création d’un délit d’homicide routier. La Première ministre Elisabeth Borne l’a annoncé en juillet dernier, mais les peines ne seraient pas modifiées par rapport à l’homicide involontaire avec circonstance aggravante, et le texte n’est pas encore arrivé à l’Assemblée nationale.

"Il y a une proposition de loi qui est prête à l’Assemblée, souligne Yannick Alléno dans Apolline Matin ce mercredi sur RMC et RMC Story. Elle n’a pas été proposée au mois de novembre. Quand on voit l’état de l’Assemblée en ce moment… On a bon espoir de la proposer à nouveau au débat. Je ne crois pas qu’on parle de politique sur ce fait-là. On parle de la vie de nos enfants et de l’avenir de notre pays. Il y a des dommages collatéraux qui sont considérables."

Yannick Alléno défend une notion "importante" avec cet homicide involontaire qui deviendrait homicide routier. "Il y a eu 509 gamins qui sont partis de la sorte l’année dernière. Ce sont des chiffres très importants. Ce n’est pas le fait d’un accident de la vie, mais de quelqu’un qui a consommé de l’alcool et/ou de la drogue. En l’occurrence, celui qui a tué Antoine, a aussi volé une voiture, avec violence. Il a consciemment roulé trop vite dans Paris et il a tué un gamin. On ne peut pas estimer que ce sont des accidents. C’est pour ça que la notion d’homicide routier est importante. En France, aujourd’hui, il y a l’homicide et l’homicide involontaire. Moi, quand j’ai rencontré la juge d’instruction, elle me parlait d’homicide involontaire. Et c’est inacceptable d’entendre ça."

Le conducteur, lui, est libre en attendant son procès. "Il a fait huit mois (de prison) parce qu’il avait déjà six mois à faire et il a fait aussi deux mois de préventive. Il va certainement passer Noël en famille. On ne vit pas avec ça", confie le chef étoilé.

"Pour les familles (de victimes), il n’y a rien"

Après les drames, les dégâts sont aussi extrêmement difficiles à réparer pour les familles de victimes. "Il y a des enfants qui partent et derrière ça, on n’imagine ceux qui restent, comme des ados en construction, confie Yannick Alléno. Ils perdent deux fois, parce qu’ils perdent leur frère, leur sœur, et qu’ils perdent aussi leurs parents parce qu’ils sont tellement tristes qu’ils ne regardent même plus leurs autres enfants. Il faut voir le choc que c’est. On a un dégât latent, invisible, dans notre pays. Il est temps qu’on regarde ça avec beaucoup d’égard et qu’on aide tous ces jeunes à s’en sortir. C’est ce qui m’affole. Il y a du décrochage scolaire, de l’isolement… Ce n’est pas anodin." Et il demande plus de soutien.

"L’égalité doit s’appliquer aussi quand un drame pareil arrive. Celui qui a tué Antoine a été pris en charge, dans une voiture de police que nous avons payée vous et moi, puis entendu par des policiers et le juge d’instruction, que nous payons vous et moi. Il a été enfermé pendant huit mois, il est sorti. Il a été suivi par des psychologues. Il a des avocats, des docteurs à sa disposition. Et pour les familles (de victimes), il n’y a rien. Elles sont obligées de se payer une psychologue, de trouver les moyens pour avoir des docteurs, de payer les avocats… Est-ce qu’on ne peut pas tourner un peu les yeux vers les victimes aussi? Donnons les moyens aux gens de s’en sortir. C’est pour ça que le terme d’homicide routier est important. C’est l’acceptation de la société de se dire qu’il y a des victimes et des co-victimes, comme pour des attentats. Moi, j’estime qu’Antoine est mort d’un attentat individuel. En France, aujourd’hui, c’est cinq fois le Bataclan."

Cette création d’un délit d’homicide routier aiderait aussi à faire comprendre les risques aux jeunes conducteurs. "Cet homicide routier va avoir cette vertu pédagogique de se dire qu’en rentrant dans sa voiture en ayant consommé de l’alcool et/ou de la drogue, on peut risquer gros, souligne Yannick Alléno. C’est différent que de se dire que c’est involontaire, c’est un accident, ce n’est pas grave. Les mots sont importants. Pour ceux qui vont passer leur permis dans les prochaines années, pour l’éducation, on aura des effets beaucoup plus importants

Laurent Picat Journaliste RMC