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Radars : la démagogie au volant

« Le Parti pris » d'Hervé Gattegno, c'est tous les matins à 7h50 sur RMC du lundi au vendredi.

« Le Parti pris » d'Hervé Gattegno, c'est tous les matins à 7h50 sur RMC du lundi au vendredi. - -

Nicolas Sarkozy et François Fillon avaient promis la plus grande fermeté en matière de sécurité routière. Et puis il y a eu la fronde de 73 députés UMP qui ont signé une pétition pour les faire plier...

Il faut quand même rappeler dans cette affaire qu'au départ c'est la très forte augmentation du nombre de tués sur les routes au premier trimestre qui a conduit François Fillon à prendre des mesures d'urgence. C'était le choix de multiplier les radars et surtout de ne plus signaler leur présence. Ce choix c'était celui de privilégier la répression sur la prévention, c'est à dire qu'on ne cherche plus à dissuader l'automobiliste d'aller vite, on sanctionne les excès de vitesse. C'est assez cohérent avec une ligne politique qui par ailleurs vise à réprimer plus sévèrement tous les délits. Du moins c'était cohérent jusqu'à ce que l'on change d'avis. En France, la voiture est un sujet sensible, surtout sur les routes de campagne, de campagne électorale.

Les députés ont pétitionné et le ministre de l'Intérieur Claude Guéant à reculé.

Oui, il a reculé même si François Fillon dit qu'il n'a pas reculé... Tout cela est dit dans des termes qui sont totalement incompréhensibles du commun des mortels. Pour comprendre il faut allumer ses antibrouillard, c'est le moins que l'on puisse dire. Claude Guéant a dit aux députés qu'aucun panneau de radar ne serait plus supprimé sans concertation locale avec les élus. Puis à la télévision il a expliqué que l'objectif restait quand même de supprimer tous les panneaux de radar. Il a ensuite expliquer qu'on va implanter des radars pédagogiques de façon aléatoire donc pour inciter les conducteurs à ralentir. Mais on dit quand même que ces radars seront posés partout où il y a des radars fixes, ce qui revient à les signaler... Bref, on a connu Claude Guéant plus clair sur l'immigration, sur les français "qui ne se sentent plus tout à fait chez eux", la c'était clair. Sur la sécurité routière c'est beaucoup plus sinueux. Il prétend qu'il avance alors qu'il a passé la marche arrière, vous pouvez essayer sur votre routière, moi sur la mienne ça ne marche pas du tout.

Cela veut dire que le gouvernement navigue et c'est incliné devant le lobby automobile ?

Pas seulement. La lettre des députés frondeurs est assez lamentable sur le fond. Elle assimile la décision sur les radars au comportement des élites que les français ne comprendraient plus et font même un rapprochement assez douteux avec l'affaire DSK. Il faut croire que le gouvernement a jugé recevable cet argument comme il avait d'ailleurs cédé sur l'assouplissement du permis à points qui envoyait déjà un mauvais signal. En réalité il faut redire que premièrement, la lutte contre la vitesse est efficace. Depuis la pose des premiers radars en 2002, il y a eu moins de morts sur les routes. Deuxièmement, la lutte contre la vitesse n'est pas suffisante. La première cause d'accident en France reste l'alcool puis ensuite l'inattention. Or le gouvernement a renoncé à abaisser encore le taux d'alcoolémie autorisé au volant et il a également renoncé à interdire l'usage des kits mains-libre des téléphones qui provoquent des pertes d'attention. Donc ce sont d'autres lobbys qu'on a refusé d'affronter et on ne veut pas le dire. Et on n'a toujours pas expliqué non plus pourquoi dans un pays où on a pas le droit de dépasser 130km/h on vend et on fabrique des voitures qui vont jusqu'à 240km/h et même plus.

Est-ce qu'il n'y pas dans la protestation des élus l'écho d'une colère de beaucoup de Français qui ont le sentiment que la répression des délits routiers est trop sévère ?

Oui sans doute. Mais là aussi il faut rappeler un chiffre: 75% des Français n'ont perdu aucun point sur leur permis. On dit même que 90% en aurait entre 10 et 12. C'est la preuve, quoi qu'on en dise, que la plupart des automobilistes en France respecte les règles. D'un point strictement électoraliste, je trouve donc assez curieux que le gouvernement n'obéisse pas à la loi du plus grand nombre. En fait dans cette affaire, il n'a pas cédé à une majorité, il a cédé à la facilité.

Ecoutez «le parti pris» de ce mercredi 25 mai 2011 avec Hervé Gattegno et Jean-Jacques Bourdin sur RMC :

Hervé Gattegno