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Légalisation du cannabis: "Il y a une voie de passage" avec Darmanin assure un député de la majorité

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Alors que l'Allemagne autorise à partir de ce lundi la consommation de cannabis récréatif, Ludovic Mendes, député Renaissance, a défendu sur RMC un modèle dont la France devrait s'inspirer.

"Il est difficile d’ouvrir un débat sur la légalisation du cannabis parce qu’on est un pays hyper moralisateur". Invité d'Apolline Matin ce lundi, le député Renaissance Ludovic Mendes s'insurge contre la France, "le pays d’Europe qui consomme le plus de cannabis mais avec les lois les plus répressives".

Alors que le ministre de l'Intérieur a lancé le 19 mars de nouvelles opérations place nette XXL pour lutter contre le trafic de drogue, Ludovic Mendes, lui, défend le modèle allemand qui vient de légaliser le cannabis à usage récréatif.

"Je me bats de mon côté contre Gérald Darmanin et Eric Dupond-Moretti sur le sujet, pas contre eux, mais contre cette politique qui démontre une seule chose, qu’elle est inefficace", s'explique Ludovic Mendes.

S'inspirer du modèle allemand

Selon le député de Moselle, ce que l'Allemagne vient de mettre en place avec la légalisation du cannabis récréatif, "c’est ce que veut l’Union Européenne". Etant donné que l'Etat ne peut pas gagner d’argent sur des drogues, il doit passer par des associations. Les consommateurs, "sont pris en charge, sur quoi consommer, comment consommer. Ils sont conseillés et accompagnés. avec des suivis psychologiques, psychiatriques et médicaux pour être sûr qu’il n’y ait pas de problème particulier", note Ludovic Mendes.

Un vrai suivi dont la France aurait besoin, car comme il le rappelle, "la majorité des personnes qui consomment ne ressemblent pas aux clichés qu’on peut avoir sur certains plateaux télé".

"Ce sont des personnes de plus de 35 ans, issues de milieux socio-professionnels plus ou moins aisés. On a un cliché sur le consommateur, et sur la manière de consommer. Mais j'ai des témoignages de personnes de 70 ans qui vont chercher ce type de produit parce qu’ils ont des problèmes de santé, qu’ils en ont besoin", raconte le député Renaissance.

"Ces personnes n'entretiennent pas le trafic"

Alors que le 20 mars dernier, le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti estimait sur RMC et BFMTV que "celui qui fume son petit pétard le samedi, il a le goût du sang séché sur les trottoirs", Ludovic Mendes le contredit et y répond aujourd'hui: "Toutes ces personnes qui consomment n’ont pas de sang sur les mains, elles n’entretiennent pas le trafic, elles n’ont juste pas le choix".

"Avec une légalisation et un accompagnement, ces personnes n’iraient pas vers le trafic. Si demain on peut se dire qu’on peut réduire de 50 à 60% ce trafic que nous connaissons aujourd’hui avec des produits bien consommés, on n'aurait pas de problème", justifie-t-il.

"Tout ce qu’on veut aujourd’hui c’est que le consommateur soit protégé. Il faut arrêter de le voir comme un simple trafiquant ou complice du trafic, il est souvent malade", insiste Ludovic Mendes.

La légalisation du cannabis récréatif permettrait même de faire des économies: "C’est des milliards aujourd’hui la répression en France, parce que derrière il faut aussi voir le travail fait par la justice". De quoi permettre de "limiter et renforcer les opérations place nette XXL là où on en a besoin et pas uniquement sur le cannabis". Le cannabis représente 50% du trafic aujourd’hui en France. "Si on impacte de 50 à 60% ce trafic-là, c’est très fort en termes d’impact financier et on va pouvoir lutter un peu plus facilement", selon Ludovic Mendes.

L'interview RMC : Ludovic Mendes - 01/04
L'interview RMC : Ludovic Mendes - 01/04
11:09

Une expérimentation lancée en 2021

Dès 2021, une mission d'information parlementaire sur le cannabis a été lancée en France. Elle a été adoptée le 28 juin 2021 par les députés et proposait notamment une "légalisation encadrée et régulée" du cannabis récréatif. Comme l'expliquait l'un des présidents de la mission Jean-Baptiste Moreau (LaREM), "le constat global sur la question du cannabis par rapport à tous ses usages, est que notre pays est à la traîne".

La même année, fin mars, une expérimentation à grande échelle du cannabis thérapeutique a été lancée en France, dans 275 établissements de santé. Elle a pris fin le 26 mars 2024 et prévoit que les médicaments à base de cannabis fasse l'objet d'une autorisation d'utilisation pour une période temporaire délivrée par l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM). L'expérimentation est prolongée jusqu'à ce qu'un médicament à base de cannabis soit autorisé et disponible, et au plus tard jusqu'au 31 décembre 2024.

Le député Renaissance Ludovic Mendes défend ce test à grande échelle: "On a mis le cannabis thérapeutique dans notre pays, sous forme d’expérimentation et qui va passer dans le droit commun incessamment sous peu donc on démontre bien qu’il y a une vertu thérapeutique à ce produit". Mais il s'indigne: "Derrière, on nous explique que c’est de la merde, qu’on a du sang sur les mains quand on consomme. Tout ça démontre que dans notre pays on ne veut surtout pas en débattre".

Même s'il n'a "pas d'espoir" que la France suive le modèle de l'Allemagne "avant la fin du quinquennat d'Emmanuel Macron", il est sûr que "dans les dix prochaines années on n'aura pas le choix, vu tout ce qu’il se passe autour de nous".

"L’Allemagne et le Luxembourg sont les premiers pays et ça va continuer", affirme-t-il, sûr de lui.

Il poursuit que des discussions avec le ministre de l'Intérieur les ont amenés à se dire "qu’il y a possiblement une voie de passage. Il faut y réfléchir". Ludovic Mendes l'assure, le ministre de l'Intérieur et le président de la République ne sont pas fermés à l'idée d'une légalisation du cannabis récréatif.

Solenn Guillanton