"Ça ramène à des temps passés": colère des élus Guyanais contre le projet de prison de Gérald Darmanin

Après Vendin-le-Vieil (Pas-de-Calais) et Condé-sur-Sarthe (Orne), c’est en Guyane, à Saint-Laurent du Maroni (La 2e ville la plus peuplée du département) que doit être construit d’ici à 2028 un troisième quartier de haute sécurité dans la prison. Le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, l’a annoncé dimanche dans le JDD alors qu’il est en visite sur place.
Dans cette future prison de 500 places, 60 seront réservées aux narcotrafiquants soumis à un régime carcéral extrêmement strict, 15 pour les islamistes et radicalisés. L’objectif de Gérald Darmanin est de "mettre hors d'état de nuire les profils les plus dangereux du narcotrafic".
"Provocation"
Mais en Guyane, sa décision provoque la colère des élus. C’est par la presse que le député indépendantiste Jean-Victor Castor, comme l’ensemble des élus guyanais, a appris la création de ce nouveau quartier de haute sécurité: "La Guyane a déjà donné", assure-t-il en référence au passé colonial du territoire. "Guyane terre du bagne, on n'a pas envie que la Guyane ait cette étiquette là parce que ça a laissé des traces indélébiles".
Surtout qu’une nouvelle prison devait bien voir le jour pour répondre à un problème de surpopulation carcérale et pas pour incarcérer des détenus dangereux comme les narcotrafiquants, dénonce le député.
"C'est une provocation, il n'y a jamais eu de discussions, il dit que c'est dans la jungle mais c'est faux, c'est à 500 mètres de l'entrée du centre-ville de Saint-Laurent-du-Maroni", abonde sur RMC et RMC Story Davy Rimane, député Gauche Démocrate et Républicaine de Guyane.
"La partie haute-sécurité qu'il veut mettre en œuvre doit répondre à une discussion. Ce choix n'a jamais été discuté, il a été imposé. Cela renvoie toute une population, tout un territoire aux années 30 avec le bagne de Kourou", poursuit l'élu.
Vers un retour d'une hostilité envers la métropole?
L'annonce de Gérald Darmanin pourrait réveiller la colère des Guyanais près de 10 ans après le mouvement social de 2017 contre l'insécurité et le manque d'infrastructures. A cette occasion, de nombreux Guyanais avaient demandé la mise en place d'une cité judiciaire, "mais ce qui a été mis sur la table hier s'est fait sans discussion" et pourrait réveiller une hostilité à l'endroit de la métropole: "C'est toute la classe politique avec la population qui participe à une levée de boucliers. Ça ramène à des temps passés", prévient Davy Rimane.
"Il a réveillé toute une population et il faut qu'il fasse très attention. La fronde elle est complète, elle est totale et les gens se braquent", ajoute-t-il.
"Le réflexe de la population c'est de refuser quand on nous impose des choses sans demander notre avis", analyse-t-il.
En mars 2017, l'ensemble du territoire s'était soulevé contre les violences et le manque d'infrastructures, réclamant des mesures. Une grève générale et des barrages avaient paralysé le plus grand département français.