Gérard Depardieu jugé pour agressions sexuelles: "Le procès d'une époque qui a accepté tout ça"

C'était un rendez-vous très attendu. Celui de Gérard Depardieu avec la justice française, visé par de nombreuses accusations d'agressions sexuelles. Il voulait s'en défendre, mais, finalement, son avocat a expliqué que les médecins de l'acteur français lui "interdisent" de se présenter à l'audience de ce lundi 28 octobre. Il doit être jugé pour agressions sexuelles après les plaintes de deux femmes sur le tournage du film Les volets verts en 2021.
Car plus loin que les rumeurs qui entourent l'acteur qui n'a jamais caché sa trivialité et sa bonhomie, les langues se délient petit à petit ces dernières années sur les comportements de l'acteur au vu et su de tous, notamment dans le cadre professionnel.
"'C'est Gérard, il est comme ça': derrière cette petite phrase, il y a une impunité totale"
Samuel Blumenfeld, critique cinéma au Monde Magazine et co-auteur de Une affaire très française traitant des troubles judiciaires de l'acteur français, témoignait sur RMC ce lundi 28 octobre, et expliquait que dorénavant, le monde du cinéma ne semble plus avoir peur de témoigner contre lui.
"En enquêtant sur lui, c'était très frappant. Sans solliciter de témoignage, nous tombions sur des gens qui nous disaient: 'Ah bah oui Gérard, sur les plateaux, il est comme ça avec les femmes. Même avec les mecs des fois, mais surtout avec les femmes'", relate-t-il.
"Derrière cette petite phrase 'C'est Gérard, il est comme ça', il y a une impunité totale", renchérit Emmanuelle Dancourt, présidente de l'association MeToo Médias qui regroupe des victimes de violences sexuelles.
"On l'a laissé faire le roi sur les plateaux, et le roi est devenu un tyran. Plus personne n'osait lui dire quoi que ce soit", lance-t-elle.
"C'est le procès d'une époque qui a accepté tout ça, qui s'est tue", poursuit-elle.
"C'était le parrain du cinéma français"
Aujourd'hui, l'heure est à la libération de la parole, explique Emmanuel Dancourt, alors qu'à l'époque, se lever contre Gérard Depardieu signifiait mettre fin à sa carrière professionnelle.
"Il portait sur ses épaules, dans les années 1980-1990, toute l'industrie cinématographique française. S'attaquer à lui, c'est s'attaquer à tout un système économique. Ce n'est pas évident", note Samuel Blumenfeld
"C'était le parrain du cinéma français", vulgarise Emmanuelle Dancourt.
"Il ne s'en prenait jamais à des stars"
D'autant que l'acteur visait particulièrement les "petites mains", assure Samuel Blumenfeld, et ne s'en prenait "jamais à des stars". "Il se comportait de manière correcte avec les femmes qui avaient le même statut que lui", confirme-t-il. "Il ne va jamais s'attaquer à celles qui ont du pouvoir", abonde Emmanuelle Dancourt. Il aurait même une admiration pour ceux qui ont plus de pouvoir que lui.
"Au delà d'être le grand ami de Vladimir Poutine, il est ami avec une bonne partie des dictateurs de la planète. Il y a une fascination chez lui pour les chefs, les puissants", glisse Samuel Blumenfeld.
Car les affaires Depardieu sont mêmes devenues politiques, jusqu'à une réaction du président de la République lors de la polémique sur les propos graveleux entendus dans un reportage de Complément d'enquête sur France 2.
"Le président Macron a quand même validé au plus haut sommet de l'Etat la culture du viol", accuse-t-elle, évoquant la défense de la présomption d'innocence de l'acteur par Emmanuel Macron en décembre 2023. "Il y a une chose dans laquelle vous ne me verrez jamais, ce sont les chasses à l'homme. Je déteste ça", avait-il lancé.
"Vous pouvez accuser quelqu'un, il y a peut-être des victimes, mais il y a aussi une présomption d'innocence qui existe", défendait le président de la République qui craignait que l'on bascule dans "l'ère du soupçon".