Refus d'obtempérer: un avocat dénonce des "homicides volontaires policiers"
Une femme de 22 ans est morte après avoir été touchée par des tirs de policiers, samedi à Paris, après un refus d'obtempérer commis par le conducteur de la voiture dans laquelle elle se trouvait. Le conducteur a également été touché au torse, mais ses jours ne sont pas en danger. Les trois policiers, à l'origine des tirs, ont tous été placés en garde à vue.
Fin mars déjà, deux frères avaient été tués après un refus d'obtempérer en plein Paris, sur l'Île de la Cité. Enfin, dans la nuit de lundi à mardi, c'est à Argenteuil, dans le Val-d'Oise, qu'un homme de 21 ans a été blessé par balle encore, toujours après un refus d'obtempérer.
Pour le chef de file de La France insoumise, ces drames sont des "abus de pouvoir inacceptables". Jean-Luc Mélenchon compare même ces tirs à une "peine de mort". Alors les policiers dégainent-ils trop vite leur arme de service? C'est ce que pense en tout cas l'avocat Raphaël Kempf, qui rappelle que la loi pour les forces de l'ordre a évolué après l'agression ultra-violente de policiers à Viry-Châtillon, dans l'Essonne.
"Depuis 2017, la loi dit que les policiers ont le droit de faire usage de leur arme en cas d'absolue nécessité et de façon strictement proportionnée, si un véhicule refuse d'obtempérer et que dans sa fuite, il risque de causer des atteintes à l'intégrité physique et à la vie des personnes."
"La qualification juridique dans certains cas, c'est le meurtre"
"Cela veut dire que l'on ne doit pas tuer s'il n'y a pas de risque pour la vie des personnes. Avant 2017, cette idée était déjà dans la loi à travers la notion de légitime défense, qui s'applique à tous et qui était utilisée par les policiers pour expliquer pourquoi ils avaient fait usage de leur arme. Théoriquement, la loi aujourd'hui est moins contraignante pour les policiers", explique l'avocat ce mardi sur RMC.
Et pour lui, "la police tue". "Dans plusieurs cas, depuis 2017 et cette année, la police a tué", assure-t-il, évoquant même des "homicides volontaires policiers". "La qualification juridique dans certains cas, c'est le meurtre. Je considère que ce sont des 'homicides volontaires policiers'. Je dis ça d'un point de vue juridique. La loi considère qu'un individu a envie de tuer quand il tire avec une arme létale dans une zone létale", ajoute Raphaël Kempf.
En avril dernier, le policier à l'origine des tirs touchant mortellement deux frères, dont l'un venait de commettre un refus d'obtempérer, avait été à l'issue de sa garde à vue, mis en examen pour "homicide volontaire".
Plus largement, Raphaël Kempf s'étonne d'ailleurs que la législation en vigueur ait été mise en place après l'attaque de policiers à Viry-Châtillon, en deux mois seulement, après des manifestations nocturnes et non-déclarées de policiers: "Le gouvernement a satisfait immédiatement leurs revendications. C'est notable parce que dans ce pays, quand une partie de la population se met en grève, on ne leur donne pas satisfaction en deux mois".