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"J'ai eu la trouille": un sénateur raconte sa manifestation avec des policiers de la Brav à Paris

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À l'invitation de Gérald Darmanin, le sénateur PS de Saône-et-Loire Jérôme Durain, a accompagné des policiers d'une Brav, une brigade de répression de l'action violente, lors de la manifestation du 1er-Mai à Paris.

En immersion. Et contrairement à d'autres le 1er-Mai, avec toutes les autorisations requises. Le sénateur PS de Saône-et-Loire Jérôme Durain, a accompagné, en tenue, des policiers en marge de la manifestation du 1er-Mai à Paris. Une sortie sur le terrain, à "l'invitation" du ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, lors de son audition devant la Commission des lois du Sénat le 5 avril dernier: "Il nous avait dit que c'était facile de poser des questions, nous invitant à aller sur le terrain, j'y suis donc allé", raconte le sénateur ce mardi sur le plateau des Grandes Gueules.

"On a un problème de maintien de l'ordre dans ce pays", déplore sur RMC et RMC Story Jérôme Durain. "En tant que parlementaire, je dois comprendre les choses et pour les comprendre, il faut aller sur le terrain", poursuit-il.

Et il assure avoir eu "la trouille", lors de son escapade avec la Brav, brigade de répression de l'action violente "à pied": "J'ai 54 ans, je fais des manifestations depuis 37 ans, je suis familier des cortèges et dès que ça commence à devenir vilain, je fais partie de ceux qui partent. Et là j'étais avec ceux qui restent quand ça tourne mal. L'unité avec laquelle j'étais est là pour s'occuper de ceux qui sont là pour pourrir un cortège, casser, abîmer et s'en prendre à des policiers. Donc c'est très violent", raconte-t-il.

"Les policiers laissent un peu faire"

Il évoque une première phase d'accompagnement du trajet de la manifestation avant des interventions dans les rues adjacentes contre les groupes de casseurs pour les disperser: "Tout ça pour faire en sorte que les vrais manifestants puissent avancer", explique le sénateur.

"Dans un premier temps, le jeu est de fluidifier le parcours. Puis il y a des exactions, les policiers laissent un peu faire, puis les unités dédiées interviennent", explique-t-il, évoquant le rôle du poste de commandement et du préfet de police qui donne l'ordre d'intervenir quand il le sent.

Ce "jeu" du chat et de la souris se répète jusqu'à l'arrivée du cortège à son point de dispersion: "C'est là que c'est très violent. Il y a quelques manifestants qui prennent quelques trucs perdus", reconnaît-il évoquant une animosité à l'égard des forces de l'ordre: "Il y a une confusion généralisée parce que les agents de l'unité d'intervention sortent pour aller interpeller des gens qui ont lancé des projectiles. Il y a du gaz, des projectiles, c'est bruyant, ça part dans tous les sens. Il y a des blessés de chaque côté", rapporte Jérôme Durain.

"Dans ces circonstances-là, c'est sacrément compliqué. Le commandant de l'unité avec laquelle j'étais a reçu un marteau, on a reçu des pierres et des bouts de fer de différentes tailles, une espèce de pommeau, des bouts de métal, tout ce qui peut être envoyé est envoyé", raconte le Sénateur.

Aller vers plus de désescalade

Alors comment faire pour que les manifestations et le maintien de l'ordre se passent dans de meilleures conditions? "Il semble qu'il y a des pays où il y a de la désescalade et où l'on ne déplore pas à la fin de la journée, autant de blessés", poursuit le parlementaire évoquant l'Allemagne où l'on préfère faire baisser la tension et privilégier le dialogue avec les manifestants. Et dans d'autres pays, le LBD ne fait pas partie de l'arsenal de la police alors qu'en France, les autorités se refusent toujours à l'interdire.

"C'est vers ça qu'il faut aller parce que nombre des dommages et des blessures arrivent lorsque la confusion prend le dessus", appelle Jérôme Durain qui estime que pour l'instant, la seule chose qui marche est l'organisation des cortèges avec la collaboration entre services d'ordre des syndicats et forces de l'ordre: "Je pense qu'il y a des gens qui font toute une manifestation sans se rendre compte que ça se passe mal", assure Jérôme Durain.

Mais le sénateur l'assure, le 49-3 et la gestion de la réforme des retraites ont mis de l'huile sur le feu: "Si on voulait donner des circonstances favorables aux casseurs, on ne s'y prendrait pas autrement que de passer en force avec le 49.3. Il y a une fracture très profonde dans ce pays. Les gens s'en prennent à la police du pouvoir, il y a quelque chose de vicié". Et pour Jérôme Durain, le gouvernement fait tout pour que la tension ne reste à son comble: "On voudrait que tout ça perdure, on ne s'y prendrait pas autrement", juge-t-il.

G.D.