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“On a créé une polémique sur des mensonges”: l’agriculteur Didier Giraud défend la Loi Duplomb

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Alors que la pétition contre la loi Duplomb dépasse le cap des 1,4 million de signatures, la gauche et les écologistes promettent de maintenir la pression à la rentrée pour obtenir son abrogation. En cause: la réintroduction controversée de l’acétamipride, un pesticide néonicotinoïde. Entre accusations de désinformation, contre-pétitions d’agriculteurs et appels à une transition réaliste, le débat s’enflamme bien au-delà des rangs parlementaires.

Forts du succès exponentiel de la pétition contre la loi Duplomb, la gauche et les écologistes ont promis lundi de maintenir la pression à l'automne autour de l'abrogation du texte agricole, décrié pour son impact environnemental.

Lancée le 10 juillet, deux jours après l'adoption de la loi qui prévoit notamment la réintroduction à titre dérogatoire et sous conditions de l'acétamipride, pesticide de la famille des néonicotinoïdes - interdit en France, mais autorisé en Europe -, la pétition avait récolté plus de 1,4 million de signatures lundi après-midi sur le site de l'Assemblée nationale.

Un chiffre largement au-dessus du seuil requis des 500.000 pour obtenir un débat en séance sur cette pétition, si la Conférence des présidents de l'Assemblée nationale, qui fixe l'agenda, en décide ainsi mi-septembre lors de la rentrée parlementaire.

La présidente de l'Assemblée, Yaël Braun-Pivet (Renaissance), s'y est dite "favorable". Tout comme Marine Le Pen, qui avait voté pour la loi, mais a estimé lundi que "seul un débat démocratique" pouvait restaurer "la confiance" des citoyens face aux "mensonges" accompagnant selon elle la pétition. Ce débat ne permettra toutefois pas un réexamen de la loi sur le fond, ce qui nécessiterait un nouveau texte législatif.

L'acétamipride

Dans les Grandes Gueules ce lundi 21 juillet, le débat est lancé. L’éleveur de bovins Didier Giraud, lui, a signé la contre-pétition. Pour le chroniqueur, la majorité des personnes qui ont signé la pétition contre la Loi Duplomb n’ont pas lu ce même texte.

“Personne n’a les tenants et les aboutissants de cette loi, et on a créé une polémique sur des mensonges. Dire que c’est le retour en masse du néonicotinoïde, c'est un mensonge. Cette loi réautorise un seul des néonicotinoïdes qui s’appelle l'acétamipride qui sert contre les pucerons des betteraves à sucre et pour la punaise des noisettes. C’est un produit autorisé dans la majorité des pays de l’UE, dont la France”, assure-t-il.

L'acétamipride, qui doit être réintroduit à titre dérogatoire par la loi Duplomb et est au coeur d'une polémique entourant le texte, est un insecticide à la toxicité bien établie pour les abeilles, mais aussi pour les mammifères, les oiseaux et l'ensemble du vivant. En 2022, l'Anses, l'agence sanitaire, avait également évoqué dans un rapport la "forte toxicité de l'acétamipride pour les organismes aquatiques et terrestres".

L'acétamipride, comme les autres néonicotinoïdes, provoque également des altérations dans la reproduction. Des traces de pesticides ont ainsi été retrouvées dans la rate de certains cervidés, affectant leur poids, leurs organes génitaux ou la survie de leurs faons.

"On a besoin de temps pour trouver une alternative”

Mais Didier Giraud le rappelle: “les conditions d’utilisation prévue dans la loi Duplomb, c’est à titre expérimental pendant trois ans pour trouver une alternative qui ne sera pas chimique, hors floraison, etc.”

“Moi, sur le fond, je n'en ai rien à faire, car j’ai ni noisettes ni betteraves, mais je suis solidaire avec mes collègues. Et cette loi va faciliter la vie des agriculteurs sur plein d’aspect”. Il l’affirme: réduire la loi Duplomb à l’acétamipride, c’est “de l’instrumentalisation, car il y a pleins de choses intéressantes dans ce texte”.

Mathieu, agriculteur et producteur de betteraves dans l’Aisne, dénonce aussi “une guérilla écologique, de l’anticapitalisme qui ne dit pas son nom”.

“Aujourd’hui, on parle de ‘loi cancer’ et sur les réseaux sociaux, on m’a souhaité d’avoir un cancer. On arrive dans des extrêmes, c’est inquiétant. Mais nous, agriculteur, on a besoin de transitions, il nous faut du temps pour trouver des solutions. On y arrive plus économiquement. Si la culture de la betterave s’arrête, c’est d’autres filières qui vont être impacté aussi, c’est une chute en cascade. J’essaye de faire au mieux, mais on a besoin de temps pour une transition et trouver une alternative”.

C.A avec AFP