Pourquoi le réarmement de la France peut sauver l'industrie et notamment l'automobile

Investisseurs et industriels et gouvernement se rassemblent ce jeudi au ministère de l'Économie en présence du ministre, Eric Lombard, et du ministre des Armés, Sébastien Lecornu. Leur mission: trouver des financements pour permettre d’augmenter la production et penser ces financements pour augmenter rapidement la cadence de la production dans le secteur de la défense.
Le ministère a annoncé, ce jeudi, que "les investisseurs publics", comme la Caisse des dépôts et BPI France, "investiront 1,7 milliards d'euros de capital qui, grâce aux coinvestissements avec les investisseurs privés, nous permettent d'investir jusqu'à 5 milliards d'euros de fonds propres additionnels en soutien du secteur".
L’industrie est appelée au secours de la course à l’armement, mais l’investissement dans la défense pourrait également sauver les sous-traitants automobiles. La Commission européenne a publié, mercredi, son premier livre blanc pour une Europe de la Défense à échéance 2030. Le sujet n’est pas seulement d’acheter des armes et des munitions en Europe, il s’agit également de les produire et de ne plus dépendre des américains.
À partir de 1915, Citroën a produit 24 millions d’obus pour l’État français. 50.000 par jour dans son usine de Javel, à Paris. Les chars construits par Renault sont considérés comme un atout décisif dans la victoire de 1918.
Aujourd’hui encore, l'industrie se met au service de la guerre. Le fabricant de drones civils Delair, en région toulousaine, a déjà basculé vers la production militaire. Ses appareils sont utilisés en Ukraine.
Le secteur automobile veut en profiter
Les volontaires, qui y voient une opportunité économique, ne manquent pas dans l'industrie, particulièrement dans l'industrie automobile. Le besoin en armement est en train de sauver un secteur en proie à une crise économique. Hors covid, la production automobile française est retombée au niveau des années 60.
Le ministre de l'Industrie, Marc Ferracci, a déclaré la semaine dernière vouloir soutenir des industriels en difficulté pour qu’ils se positionnent sur le secteur de la défense. C’est ce qui se passe dans le Morbihan avec les fonderies de Bretagne, sous-traitant de Renault placé en redressement judiciaire en janvier. Un repreneur promet de sauver 80% des emplois en lançant une production de 24.000 obus par jour.
En difficulté, EFI Automotive dans l’Ain est un sous-traitant automobile qui produit des capteurs pour piloter des boîtes de vitesse. La société pourrait produire des capteurs pour les volets des ailes d’avion.
Tout le secteur s’intéresse à l’industrie de défense désormais. Les commandes des constructeurs automobiles sont en baisse, et des PME peuvent être sauvées. Mais il va falloir du temps pour adapter la production. Un économiste spécialisé alerte auprès de l’AFP:
"Souvenez-vous de l'épisode des masques durant l'épidémie sanitaire. On s'est mis à en fabriquer à toute vitesse et un an après personne ne les achetait, car ils étaient trop chers."
L'Allemagne dans la même optique
En Allemagne aussi, c’est l’industrie automobile qui va assurer le réarmement. Là aussi, c’est une aubaine pour un secteur en crise: mardi Audi annonçait un plan de suppression d’emplois, alors que son usine en Belgique envisage de transformer ses lignes de productions de voitures électriques en lignes de véhicules militaires.
Les Allemands font le même parallèle que chez nous: un secteur qui a besoin de capacités de production et un autre qui connaît une chute de son activité. Le plus gros producteur européen de munitions, Rheinmetall, qui fabrique les chars allemands Leopard a annoncé la conversion de deux usines consacrées à des pièces automobiles vers la production d’armements.
Mais en Allemagne toujours, on s’inquiète aussi du retard que va prendre l’industrie automobile sur les modèles innovants. Là où la Chine va continuer de progresser.