Ukraine, Gaza, européennes… Ce qu'il faut retenir de l'interview d'Emmanuel Macron aux JT de 20h

Emmanuel Macron à Caen, dans le Calvados, sur TF1 et France 2 le 6 juin 2024 - BFMTV
À trois jours du scrutin des élections européennes, Emmanuel Macron a accordé, ce jeudi 6 juin 2024 au soir un entretien aux journaux télévisés de 20h. Un entretien aussi attendu que contesté par les oppositions, qui ont déjà saisi l'Arcom, à l'occasion du 80e anniversaire du Débarquement et de ses commémorations et alors que les candidats jettent leurs dernières forces dans la campagne.
S'exprimant sur TF1 et France 2, mais aussi LCI et franceinfo, et rediffusé sur BFMTV, le Président était interrogé par les journalistes Gilles Bouleau et Anne-Sophie Lapix pendant près de 30 minutes depuis l'abbaye aux Hommes de Caen, en Normandie.
"J'ai du mal à comprendre en quoi parler du Débarquement, parler de ce qui se passe en Ukraine et en Russie, parler de ce qui se joue avec ces élections européennes, c'est ne pas être dans mon rôle", s'est d'emblée défendu Emmanuel Macron, répondant aux critiques sur sa prise de parole. "Parler au moment des européennes, c'est essentiel" pour le pays et "la vie de la nation", "c'est aussi mon rôle".
Les commémorations du Débarquement pour "la liberté"
Pour le Président, les Français ont été au rendez-vous des commémorations du D-Day. Ils "sont là parce qu'ils tiennent à ce moment d'histoire", a-t-il affirmé.
Sur l'absence du président russe Vladimir Poutine, non convié aux festivités du jour, "il s'est passé une rupture en 2022" lorsqu'il a lancé "une guerre complète", a indiqué Emmanuel Macron. Il a aussi salué la réaction du public à la présence du président ukrainien Volodymyr Zelensky, chaleureusement applaudi.
"Merci à nos anciens combattants et aux vétérans de nos alliés, qui ont fait en sorte que l'on puisse parler de liberté aujourd'hui", a aussi glissé le président de la République en toute fin d'interview.
"La paix ne peut pas être la capitulation" face à la Russie
"Je pense qu'ils ont eu raison à l'époque", a expliqué Emmanuel Macron en parlant de l'ancienne chancelière allemande Angela Merkel et l'ex-président français François Hollande, qui tentaient de négocier avec Moscou il y a 10 ans. Il a rappelé que les accords de Minsk, en Biélorussie, ont été signés par l'Ukraine et par la Russie en 2014.
Mais, en lançant son invasion en février 2022, la Russie a "foulé le droit international". Aider l'Ukraine, "c'est protéger ces valeurs, notre droit à la souveraineté, l'intégrité territoriale et éviter la loi du plus fort", a-t-il ajouté. "La paix, ça ne peut pas êter la capitulation de l'Ukraine", a affirmé le chef de l'État, redoutant que la Russie aille encore plus loin. "La paix doit arriver par le biais d'une négociation", a-t-il souligné ajoutant que le moment n'est pas encore là car la Russie "continue d'avancer".
Emmanuel Macron a d'ailleurs confirmé qu'un "compatriote français" a été arrêté en Russie. "Il travaille pour une ONG suisse qui sert beaucoup de grandes figures internationales. Il recevra toutes les protections consulaires nécessaires dans un tel cas", a-t-il précisé.
"Depuis le premier jour, les Russes menacent (...). Nous sommes organisés pour faire face à tous les risques."
Des avions français seront livrés à l’Ukraine
"L’Ukraine résiste, elle tient" face à l’invasion russe, a estimé Emmanuel Macron, en reconnaissant néanmoins que "la situation est difficile". Il a annoncé de nouvelles aides à Kiev. Cinq nouveaux avions de combats seront envoyés et des programmes de formation de pilotes seront dispensés "d'ici la fin de l'année". "Demain, nous allons lancer une nouvelle coopération et annoncer la cession de mirages 2000-5", a déclaré Emmanuel Macron. "Nous proposons de former 4.500 soldats ukrainiens."
Le Président a affirmé que la formation de soldats ukrainiens n'est pas un "facteur d'escalade". "Nous n'avons jamais été dans l'escalade, ce n'est pas nous qui avons attaqué l'Ukraine." Il a insisté sur le fait que "la France n'est pas en guerre avec la Russie".
"La limite est fixée par ce que font les Russes."
Interrogés sur ses propos concernant la possibilité pour les Ukrainiens d'attaquer les Russes sur leur sol avec des armes françaises, le chef de l'État a assuré qu'elles ne seront pas utilisées pour bombarder les civils mais que les limites sont fixées.
Appel à la trêve à Gaza
Emmanuel Macron a répété souhaiter "un cessez-le-feu le plus tôt possible" à Gaza. "Il le faut", a-t-il dit, soulignant que la France a appelé à cela dès le mois d'octobre. D'après lui, son homologue israélien Benyamin Netanyahou reste un interlocuteur "légitime". "La position de la France, c'est la condamnation implacable des attaques du 7 octobre, c'est la demande de libération des otages, c'est la promotion du cessez-le-feu et de la solution à deux États", a résumé le Président.
Emmanuel Macron a d'ailleurs indiqué que le Quai d'Orsay n'a pas de nouvelles des deux ressortissants français qui sont encore retenus en otage par le Hamas.
Emmanuel Macron a néanmoins estimé que ce n'était pas "raisonnable" de reconnaître maintenant un État palestinien, comme d'autres pays européens l'ont récemment fait. "Cela n'aura pas d'effet sur Benyamin Netanyahou", a-t-il dit, jugeant que ce n'est pas "la bonne réponse" et pas "le bon moment".
"L'Autorité palestinienne doit passer par des réformes" avant cela. "On ne reconnaît pas un état sur la base d'une indignation, il faut le faire dans un processus, l'heure viendra et la France le fera", a-t-il indiqué, répétant qu'il n'y a "pas de tabou".
"La France reconnaîtra l'État de Palestine quand ce sera un élément complet de la paix et de l'équilibre de la région."
Emmanuel Macron a parlé de l'importation du conflit en France, notamment avec l'augmentation des actes antisémites et les manifestations de soutiens à Palestine. "Nous serons implacables face aux actes d'antisémitisme", a-t-il réagi. "Quand je vois la jeunesse qui est touchée par Gaza, je la comprends. Mais quand cela devient la justification d'actes antisémites (...) ce n'est plus la même chose."
Se rendre aux urnes pour les européennes
Concernant les élections européennes, Emmanuel Macron a appelé au vote dimanche. "J'appelle mes compatriotes à aller voter le 9 juin, il n'y a qu'un tour." "C'est très important", a-t-il ajouté, faisant un parallèle avec les Britanniques qui ne sont pas allés voter pour le Brexit et "s'en sont mordus les doigts".
Le président de la République a appelé à un "sursaut" pour "protéger la France" et l'aider "à être plus forte en Europe". "On voit monter partout en Europe l'extrême droite", a prévenu Emmanuel Macron. "Si demain la France envoie une très grande délégation d'extrême droite, si d'autres pays le font, l'Europe peut se retrouver bloquée." Selon lui, cela peut être la fin d'une Europe "qui protège" face au risque terroriste, au défi climatique ou encore la guerre. "Face à tous ces défis, est-on plus fort Français ou Français-Européen? Moi j'ai la réponse", a-t-il lancé.
"Je ne crois pas aux sondages, je crois aux élections", a aussi lâché le Président. Avant de conclure:
"La liberté, la démocratie, c'est comme l'Europe, c'est un combat de chaque jour. Ceux qui pensent que c'est acquis et qu'on peut faire n'importe quoi se trompent."