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De nouveaux antibiotiques découverts grâce à l'IA pour faire face à l'antibiorésistance

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L’antibiorésistance, le fait que les bactéries deviennent de plus en plus résistantes face aux antibiotiques, est un énorme enjeu de santé publique. Ce phénomène pourrait tuer plus que le cancer à l'horizon 2050. Et l'une des solutions pourrait être technologique grâce à l'intelligence artificielle (IA)

Ça va être le plus gros défi du monde de la santé dans les années qui viennent. Dans les 25 prochaines années, près de 40 millions de personnes dans le monde pourraient mourir directement d’infections résistantes aux antibiotiques. Et comme souvent, c’est peut-être de l’innovation technologique que viendra apporter la solution : concevoir de nouvelles générations d’antibiotiques ultra performants grâce à l’IA, l'intelligence artificielle.

En décembre dernier, des chercheurs du MIT ont publié dans la revue Nature des résultats très spectaculaires sur le staphylocoque doré, bactérie potentiellement mortelle et extrêmement résistante aux antibiotiques. Ils ont trouvé, pour la première fois depuis 60 ans, une nouvelle classe d’antibiotiques potentiellement hyper efficaces en utilisant l’IA.

280 molécules prometteuses face au staphylocoque

Les chercheurs ont conçu des algorithmes qui analysent et prédisent l’efficacité potentielle de 12 millions de substances et de composés déjà disponibles sur le marché sur la bactérie en question. Le gros avantage de l’intelligence artificielle, c’est qu’elle peut tester virtuellement en un temps record, en simulation, des tonnes de combinaisons de molécules face à des milliers de paramètres. Beaucoup plus rapidement que des chercheurs humains "manuellement".

A la fin sur ces 12 millions de substances et composés, l’IA en a sélectionné 280 jugés prometteurs, capables potentiellement de surmonter la résistance du staphylocoque. Après des tests réalisés sur des souris, 2 composés ont montré une efficacité très spectaculaire, avec une réduction significative des bactéries staphylocoques qui sont très difficiles à éliminer. C'est donc une IA qui a découvert une nouvelle classe d’antibiotiques hyper puissants même si tout cela devra évidemment être validé par des tests cliniques sur l’homme.

Estelle Denis donne rendez-vous aux auditeurs de RMC et téléspectateurs de RMC Story pour son talk-show d’opinions et de débats. Toujours accompagnée de Fred Hermel, Emmanuelle Dancourt, Périco Legasse, Estelle Denis et sa bande s’invitent à la table des Français pour traiter des sujets qui font leur quotidien. « Estelle Midi », c’est de l’actu, des débats, des coups de gueule, des coups de cœurs, des infos et un zapping des meilleurs moments entendus sur RMC.
On n'arrête pas le progrès : De nouveaux antibiotiques découverts grâce à l'IA - 21/10
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L'IA industrialise le processus

C'est une vraie révolution dans la manière dont on découvre de nouveaux médicaments. C'est plus rapide, ça coûte beaucoup moins cher et ça peut s'appliquer à plein d'autres maladies. Trouver un nouveau médicament de manière classique, c’est encore très artisanal, cela peut prendre 15 à 20 ans et coûte des dizaines de millions d’euros. Il faut tâtonner, tester, rater très souvent. C’est comme chercher une aiguille dans une botte de foin : il faut trouver pour chaque bactérie, une molécule dont l’action soit efficace sur cette bactérie en particulier. En évitant qu’il y ait trop d’effets secondaires et en prenant en considération qu’elle puisse être absorbée par la paroi intestinale, et passer le foie, qui purge beaucoup de choses. C'est très compliqué et ça coûte extrêmement cher.

L’IA permet donc d’industrialiser le processus. Cela pourrait servir dans la lutte contre les maladies infectieuses, les maladies neurodégénératives, les cancers, les maladies cardiovasculaires mais aussi pour la découverte de nouveaux vaccins… Il y a énormément de potentiel.

De nouvelles innovations médicales

Malgré tout, l’IA n’est pas la panacée. C’est tout un arsenal d’innovations qu’on va devoir déployer dans les années qui viennent pour lutter contre l’antibiorésistance. Plein de pistes, qui s’appuient ou pas sur l’intelligence artificielle. Des antibiotiques de nouvelle génération d’abord, à tête chercheuse, capables de cibler et d’éliminer précisément les "mauvaises" bactéries -celles qui sont responsables de la maladie- et les bactéries qui présentent un gène de résistance. Tout en épargnant les bonnes et en laissant la flore microbienne, essentielle à notre bien-être, intacte.

Ou encore des virus tueurs de bactéries (mais inoffensifs pour l’homme), qu’on appelle les phages. C’est la phagothérapie. On va injecter ces virus qu’on trouve notamment dans les eaux usées ou dans le sol et qui sont en fait les prédateurs naturels de ces bactéries. Cette technique n’est pas nouvelle, elle a été découverte il y a plus de 100 ans par un Français, et utilisée jusqu’aux années 20 et l’arrivée des antibiotiques. Mais elle regagne de l’intérêt à cause des problèmes actuels d’antibiorésistance. Mais ça reste compliqué car ce sont des traitements personnalisés, il faut trouver le phage actif sur la bactérie qui infecte le patient, le produire et le purifier, et l’injecter en intraveineuse. Beaucoup plus compliqué qu’une gélule à avaler.

En France, les chercheurs de l'Inserm sont en pointe sur le sujet. Cette technique est déjà utilisée dans le cadre d’essais cliniques et, dans des cas très rares, lorsque tous les autres traitements ont échoué.

SG avec Anthony Morel