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Jusqu’à 30 euros les 3 heures: dans les hôpitaux publics, les parkings se privatisent

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Les parkings des hôpitaux publics deviennent de plus en plus privés. Gérés par des opérateurs extérieurs, ils coûtent parfois très cher, au grand dam des patients. Le ministre de la Santé François Braun se décharge de toute responsabilité.

C'est un modèle qui se généralise en France: la privatisation des parkings des hôpitaux publics. C'est ce qu'a constaté Christian. Diabétique, il souffre d’insuffisance respiratoire et se rend régulièrement à l’hôpital public de Nancy. Et depuis un peu plus d’un mois, le parking est devenu payant. "Je n'ai pas une grosse retraite donc si je vais à l'hôpital, soit le médecin me fait un bon de transports donc ça va coûter plus cher à la Sécu, ou alors je prends mon véhicule et mon compteur temps va être facturé", déplore-t-il au micro de RMC.

Et les prix sont prohibitifs. Désormais, pour se garer dans l’enceinte de l’hôpital de Nancy, si les 30 premières minutes sont gratuites, au-delà, il faut compter 6€ la première heure, 18€ les 2h et jusqu’à 30€ les 3h! Pour payer moins cher, il faut aller plus loin, dans des parkings à l’extérieur de l’établissement.

De nombreux autres hôpitaux concernés un peu partout en France

Le premier à avoir privatisé son parking, c'est l'hôpital de Bordeaux en 2012. Et la tendance s'est accélérée depuis deux ans: Caen, Lorient, Epinal, Cambrai, Le Mans, Amiens, Toulouse, Le Havre, Lyon, Avignon, Nancy donc et bientôt La-Roche-sur-Yon.

Ce sont des opérateurs privés comme Q-Park, Indigo ou encore Vinci qui gèrent les parkings de ces centres hospitaliers publics. Et pour Christian, c’est intolérable: "Un parking, ça fait partie de l'hôpital et de l'accès au soin. Et on démantèle à nouveau l'hôpital en disant: 'tu vas te garer mais tu payes'", souligne-t-il.

"Vous allez en simple consultation, le médecin a un peu de retard, ça va donc vous coûter plus cher. Si quelqu'un vous accompagne, quand il ressort, il va payer. On parle de service public mais c'est faux", ajoute Christian.

Du côté des hôpitaux, on justifie ce choix par la nécessité de désengorger et de fluidifier le stationnement, lutter contre les voitures-ventouses par exemple, qui restent des jours voire des semaines à la même place.

Comment est utilisé l'argent?

Selon la direction de l’hôpital de Nancy, les recettes générées ont vocation à financer de nouveaux investissements… dans les parkings! Impossible de savoir en revanche la part des bénéfices qui revient à l’hôpital et celle qui va à l’opérateur. 

Seule certitude : l’activité est lucrative. "Le secteur hospitalier est un segment en pleine croissance", explique par exemple Indigo, dans une communication sur ces chiffres l’année dernière. L’entreprise se félicite de gérer 15.000 places dans 22 hôpitaux de France.

"Je ne gère pas les prix des parkings des hôpitaux", répond François Braun

Contacté, le ministère de la Santé assure qu'aucune réglementation n’existe en la matière. Chaque hôpital est autonome et donc libre de faire ce qu’il veut de ses parkings. À Mulhouse, par exemple, le stationnement est payant depuis 2019 mais seulement pour les visiteurs, pas pour les patients. L’hôpital de Nancy, dans lequel se rend régulièrement Christian, pourrait donc parfaitement faire ce choix-là.

Invité d'"Apolline Matin" sur RMC et RMC Story ce mercredi, le ministre de la Santé François Braun évacue toute responsabilité, se cachant derrière le libre choix des hôpitaux: "Je ne gère pas les prix des parkings des hôpitaux. Je suis moi-même retourné dans mon hôpital d'origine et j'ai dû payer. Je ne peux pas légiférer là-dessus", se défend-il.

Et ce n'est pas sa priorité: "Je suis d'accord sur cette problématique mais je ne vais pas régler dans l'immédiat le problème du coût des parkings. Je pense que notre système de santé a beaucoup d'autres difficultés. Il y a des gens loin du soin qui n'arrivent pas à y accéder et c'est ça ma priorité", conclut le ministre de la Santé.

Amélie Rosique, Joanna Chabas et Elise Denjean (avec G.D.)