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Vente de carburant à perte: l'annonce du gouvernement tourne au fiasco

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L'annonce par le gouvernement de l'autorisation de vendre du carburant à perte, dès décembre, a rencontré une levée de boucliers de l'ensemble des distributeurs d'essence. Mais l'exécutif ne semble pas prêt à abandonner son projet.

Une idée en panne sèche. Quatre jours après avoir annoncé une future autorisation de vente à perte aux distributeurs de carburant, l'exécutif cristalise la colère des pétroliers et des distributeurs. L'annonce faite par Elisabeth Borne samedi dernier tourne même au fiasco devant la levée de boucliers de l'ensemble des acteurs de la chaîne de l'essence.

  • Une annonce surprise

Tout commence samedi 16 septembre avec l'annonce surprise de la Première ministre Elisabeth Borne. Dans les colonnes du Parisien, la cheffe du gouvernement explique que les distributeurs de carburant pourront vendre de l'essence à perte, en levant une interdiction vieille de 60 ans.

L'objectif est simple. Permettre des ristournes naturelles à la pompe devant des prix toujours plus élevés et quasi immobiles malgré les fluctuation du cours du baril de pétrole.

Dans la foulée, Bruno Le Maire, le ministre de l'Economie, présente le calendrier: les ventes à perte pourront commencer dès décembre 2024 et peut-être même le 1er décembre.

  • Patrick Pouyanné dit non

Mais très vite, l'exécutif doit faire face à une levée de bouclier de la part des principaux intéressés. Les indépendants, très inquiets, d'abord. Puis, comme un leader syndicaliste, le PDG de TotalEnergies prend la tête de la fronde, annonçant son refus de vendre à perte.

"Vous vendez souvent à perte, vous, des produits? Un peu de bon sens!", a assuré Patrick Pouyanné mardi à TMC, ajoutant qu'il ne descendrait "pas plus bas", que le plafond à 1,99 euro le litre, appliqué dans ses stations-service. "Ce plafond s'applique dans à peu près aujourd'hui 3.000 stations. Donc ça veut dire que le prix normal est au-dessus", a défendu le PDG de Total Energies.

  • Le stop des distributeurs

Pour une fois, le gouvernement fédère. Mais contre lui. Dans le sillage de Patrick Pouyanné, les grands distributeurs disent eux aussi "non" au gouvernement. Convoqués, au ministère de l'Economie mardi, les dirigeants de Leclerc, Carrefour, Intermarché, Système U, Casino et Auchan, en concurrence sur le terrain, se sont alliés pour faire part de leur opposition au projet de l'exécutif.

"L'interdiction de la revente à perte est un principe très important du commerce depuis 1963, il ne faut pas ouvrir cette boîte de Pandore", a prévenu Alexandre Bompard, le patron de Carrefour.

Une bonne nouvelle pour les consommateurs, assure Frank Rosenthal expert de la grande distribution: "S'ils le font, ils vont se rattraper sur d'autres produits. Ce n'est pas bien en période d'inflation de faire un geste sur l'essence d'un côté et de l'autre augmenter les prix, alors que les distributeurs n'y sont pour rien sur l'envolée des prix du carburant”, explique-t-il à RMC.

Vente à perte de carburants : le fiasco ! - 20/09
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  • Le gouvernement persiste

Mais il en faut plus pour arrêter le gouvernement, habitué au 49-3 et à peine tancé par la mobilisation contre la réforme des retraites l'hiver dernier. "Cette possibilité n'est pas une obligation", a assuré le ministre des Comptes publics Thomas Cazenave, comme pour rassurer les distributeurs.

"Chacun doit et peut faire un effort", a déclaré le porte-parole du gouvernement Olivier Véran devant la presse après le Conseil des ministres, en défendant la mesure malgré le "stop" des distributeurs.

Et pour rassurer les indépendants, Bruno Le Maire a même promis une compensation pour les ventes à perte, au terme d'une réunion avec leur représentant Francis Pousse. "C’est nécessaire, parce qu’il faut maintenir des stations en ruralité et en zone péri-urbaine. On est un service au public, un service essentiel", a défendu Francis Pousse sur RMC et RMC Story mardi.

Le gouvernement semble même se heurter à certains de ses alliés. Des voix commencent à s'élever dans les rangs de la majorité pour demander une baisse des taxes. Des élus du camp d'Edouard Philippe ou de François Bayrou craignent que la vente à perte, soit inefficace, voire contre-productive.

G.D.