"On veut une décision cohérente": un policier en arrêt maladie après la polémique à Marseille témoigne

Audience très attendue ce jeudi matin à la cour d'appel d'Aix en Provence. La chambre de l'instruction examine l'appel du policier mis en examen et placé en détention provisoire pour violences en réunion dans le dossier le suspectant d'avoir passé à tabac, en compagnie de trois de ses collègues, le jeune Hedi.
Cette mesure de privation de liberté, exceptionnelle pour un fonctionnaire de police, avait provoqué il y a deux semaines un mouvement de contestation au sein de la police à Marseille. Une vague d'arrêts maladie et de service minimum avait ensuite gagné d'autres villes du sud ainsi que de la région parisienne.
Nicolas*, policier à Marseille, s'est mis en arrêt maladie au lendemain du placement en détention provisoire de son collègue. Il suivra évidemment avec attention la décision de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix en Provence.
"Une date symbolique"
Pour RMC, il a accepté de témoigner, de manière anonyme, de son ressenti ainsi que de la situation des policiers qui se mettent en arrêt maladie pour protester contre la décision de placement en détention provisoire de son collègue.
Qualifiant ce jeudi 3 août comme "une date symbolique", Nicolas dit que ses confrères et lui savent "très bien qu'on n'a pas le pouvoir de faire libérer notre collègue", et que "c'est à la justice d'en délibérer".
S'il admet "qu'on peut se poser des questions" sur le passage à tabac du jeune Hedi et sur la responsabilité de ses collègues, Nicolas assure ne pas chercher "à excuser" les policiers, mais "juste à expliquer" ce qui a pu se passer.
"Pas la police qui lui a enlevé un morceau de crâne"
Pour le policier marseillais, il est nécessaire de rappeler qu'il "faut prendre en compte tout un contexte".
"On n'est pas sur une patrouille quotidienne, où des policiers décideraient de descendre et d'aller tabasser le jeune par plaisir. On est dans un contexte d'émeutes, où on nous demande de rétablir l'ordre…", estime Nicolas, policier à Marseille en arrêt maladie.
S'il répète qu'il n'était pas sur place au moment des faits et qu'il ne peut donc donner un avis complet, le policier dit aussi qu'il faut comprendre la tension qui régnait dans les effectifs de police, avec des violences urbaines d'une intensité qu'il n'avait "jamais vécue" et une "multitude d'interventions à faire".
D'autre part, Nicolas estime aussi de manière douteuse que le parti d'Hedi "est plutôt malin". Selon lui, "il ne faut pas oublier que ce n'est pas la police qui lui a enlevé un morceau de crâne, ce sont les médecins. Je ne dis pas que ce sont les médecins qui sont responsables de son état (...). On a différentes déclarations, on parle de rupture d'anévrisme… mais ce n'est pas la police qui lui a causé l'anévrisme non plus".
Pour rappel, le jeune Hedi explique avoir reçu un projectile émanant d'un pistolet LBD au niveau du crâne. Les policiers l'auraient ensuite mis à part dans une zone retirée pour le passer à tabac.
"On peut finir soit en prison, soit à la morgue"
Nicolas, le policier marseillais, déplore plus globalement qu'en "faisant son métier, le fonctionnaire de police finit en détention provisoire, alors qu'il présente toutes les garanties : il ne va pas partir à l'étranger, il ne va pas partir en cavale. Pour nous c'est incohérent. On attend une justice, on attend une décision cohérente".
Cette décision sera étudiée à compter de 8h30 ce jeudi matin. Elle pourrait toutefois être mise en délibéré et être rendue plus tard dans la journée ou au cours des jours suivants.
En attendant, Nicolas continuera de partager son "sentiment de lassitude et de ras-le-bol de se dire que même en effectuant une mission et en allant travailler tous les jours, on peut très facilement finir soit en prison, soit à la morgue".