Reconstitution de la mort de Nahel: "Une justice à l'avantage des policiers", selon Vincent Brengarth

La justice organise ce dimanche matin à Nanterre (Hauts-de-Seine) une reconstitution des faits ayant conduit au décès de Nahel, ce jeune de 17 ans tué le 27 juin 2023 par un tir de police, un drame qui avait entraîné des émeutes d'une intensité exceptionnelle, dénoncant entre autres les violences policières. Le policier Florian M., âgé de 38 ans au moment des faits, a été placé en détention provisoire pendant cinq mois. Il a été libéré et placé sous contrôle judiciaire en novembre après plusieurs demandes de son conseil.
L'avocat Vincent Brengarth, qui publie le livre À armes inégales: face au juge, le policier est-il un citoyen comme les autres ? le 16 mai prochain, a estimé dans la Matinale Week-end sur RMC que, "généralement, la justice est largement à l'avantage des policiers".
La reconstitution n'est pas un "procès avant l'heure"
L'avocat, qui représente par ailleurs la famille Chouviat, décédé le 3 janvier 2020 après son interpellation par des policiers et dont l'information judiciaire est encore en cours, réfute toute idée de "procès avant l'heure" avec la reconstitution de la mort de Nahel. C'est le signe que "les magistrats et l'instruction puissent faire leur travail", a-t-il pointé.
Si la mort de Nahel a embrasé la France et fait ressurgir la question des violences policières, Vincent Brengarth souhaite que la question du traitement des fonctionnaires de police par la justice se pose. "Généralement, la justice est largement leur avantage et ce quel que ce soit les stades de la procédure", a-t-il déploré. "L'IGPN va venir accréditer leur récit", qui défend une "position structurelle", selon l'avocat.
Pour Vincent Brengarth, la puissance des syndicats dans la profession, dont la parole est relayée médiatiquement, ainsi que les prises de position en faveur des policiers jusqu'au ministère de l'Intérieur, favorisent cette situation. Frédéric Veaux, directeur général de la police nationale, avait notament déclaré qu'"avant un éventuel procès, un policier n’a pas sa place en prison ». "Des déclarations anormales venant d'un supérieur hiararchique", a taclé l'avocat.
"Un policier est soumis au même droit que n'importe quel justiciable. La qualité de fonctionnaire de police peut être une circonstance aggravante. Il y a une forme de basculement vers une circonstance atténuante", déplore Vincent Brengarth
Le minstre de l'Intérieur Gérald Darmanin avait évoqué une "présomption de culpabilité" qui pèserait sur les fonctionnaires de police. "Il faudrait exonérer les policiers d'être placés en détention provisoire, ériger une justice d'exception ?" s'est inquiété Vincent Brengarth.
L'usage des armes et la formation des policiers en question
Pour l'avocat, l'usage des armes des fonctionnaires de police n'est pas assez évoquée dans le débat public. L'affaire Nahel, selon lui, aurait pu le permettre. Désarmer la police? "Je souhaiterais que ce soit une possibilité mais elle apparaît comme hypothétique", a-t-il regretté, mettant en avant la délinquance armée et le terrorisme.
Selon lui, la formation des policiers est insuffisante et permet à ce que des drames comme celui de Nahel interviennent. "La question qu'on doit se poser, c'est l'augmentation de l'arsenal des armes de police, ce sont des armes de plus en plus lourdes avec des fusils d'assaut. C'est aussi la question de la formation. Cela conduit à ce que des policiers insuffisament formés utilisent leurs armes à un moment ou ça peut ne pas s'imposer", a-t-il exposé.