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"L'agriculture est en faillite": les agriculteurs, toujours en colère, rencontrent Emmanuel Macron

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La colère des agriculteurs n'est pas retombée, quelques mois après les blocages. Emmanuel Macron reçoit, ce jeudi à l'Élysée, les principaux syndicats du secteur.

Trois mois et demi après les premiers blocages, la colère est toujours présente sur les tracteurs et dans les champs français. Les difficultés financières, aussi. "Les comptes en banque sont à -50.000 euros et aujourd'hui je n'ai plus de quoi payer mes fournisseurs", déplore Xavier Piot, agriculteur bio dans l'Oise.

Des aides qui tardent à arriver

Ce dernier était présent lors du blocage de l'A1. Les ventes de ses pommes de terre ne suffisent pas à renflouer sa trésorerie. Il attend les 90.000 euros de la PAC promis par le gouvernement depuis le 15 mars.

"Ce que l'administration nous annonce, c'est au mieux pour le mois de juin. On a la chance d'avoir des banques qui décalent de mois en mois les dates d'échéance mais ils nous font payer et les intérêts aujourd'hui sont à 6%", explique-t-il.

"Pour l'instant, on ne voit pas le changement de modèle", remarque Vincent Boucher, qui s'était lui aussi mobilisé il y a trois mois et demi. Ce céréalier, responsable local de la FNSEA dans l'Oise, s'agace.

"On demande simplement de vivre de ce qu'on vend. Si on est révolté, c'est parce que l'agriculture est en faillite".

"Si je cède à mes enfants, je ne vois pas de perspective à plus de sept ans, dix ans, comme il n'y a pas de projet à long terme pour la France par rapport au milieu agricole. Moi, je ne préfère pas que mes enfants s'installent. Ce serait aller dans un mur et ça, je ne peux pas le supporter", ajoute-il, désespéré.

Pour l'instant, le projet de loi agricole ne les rassure pas. Tant que le texte n'est pas voté et les décrets d'application pris, ces agriculteurs restent scecptiques.

Le président rencontre les syndicats

Emmanuel Macron reçoit ce jeudi matin à l'Élysée les principaux syndicats agricoles (FNSEA, Jeunes Agriculteurs, Confédération Paysanne, Coordination Rurale) pour une "réunion de travail". Une rencontre promise par le président lors de sa visite au Salon de l'Agriculture en février dernier.

Avec leur mobilisation, les agriculteurs avaient obtenu gain de cause sur plusieurs points: abandon de la hausse de la taxe sur le GNR (gazole non routier), l'exemption partielle des 4% de jachère, davantage de contrôles de la loi Egalim et le versement des aides PAC au 15 mars au plus tard.

En parallèle de cette rencontre entre le président et les syndicats agricoles, les députés poursuivent l'examen du projet de loi sur l'agriculture en commission. Un texte censé aider à renouveler les générations d'agriculteurs et remplacer les nombreux départs à la retraite des prochaines années. Le gouvernement affirme qu'il faut trouver 200.000 nouveaux chefs d'exploitation d'ici 10 à 15 ans.

Le principal point de tension concerne le foncier, l'accès à un terrain pour de jeunes agriculteurs. Un enjeu majeur pour renouveler les générations mais trop peu présent dans le texte de l'avis général des oppositions. "On marche sur la tête" s'agace un socialiste.

Même frustration concernant la fiscalité. Les Républicains l'assurent, "on n'attirera jamais assez de nouveaux exploitants sans une fiscalité plus avantageuse". Ce n'est pas l'objet du texte, rétorque le gouvernement qui renvoie le débat à l'automne, pour le budget de l'année prochaine.

Résultat, selon une élue écologiste, "les agriculteurs se désintéressent totalement de ce texte". Un député LR va dans le même sens: "On n'attendait pas le grand soir pour l'agriculture, mais au moins un texte d'ampleur et ce n'est pas le cas".

Caroline Philippe et Romain Cluzel (avec T.R.C.)