Loi immigration: l'Assemblée approuve la motion de rejet, déroute pour le gouvernement

Gérald Darmanin à l'Assemblée nationale le 11 décembre 2023 - Ludovic MARIN / AFP
Terrible échec pour le gouvernement. L'Assemblée nationale a adopté par 270 voix contre 265 une motion de rejet préalable au projet de loi immigration. La motion adoptée était défendue par le groupe écologiste.
Son adoption entraîne l'interruption de l'examen avant même que ne soient abordés les articles au fond, sur cette version du texte recentrée par la commission des Lois de l'Assemblée, après un net durcissement au Sénat.
Le gouvernement peut choisir désormais de laisser le texte poursuivre son parcours législatif au Sénat ou en commission mixte paritaire réunissant députés et sénateurs, ou décider de l'abandonner.
Réunion de crise
Une réunion de crise du camp présidentiel a été convoquée dans la foulée à l'Assemblée, selon une source ministérielle, pour décider de la marche à suivre.
"Tout ce que je souhaite c'est que le gouvernement poursuive (...) dans sa volonté d'apporter des réponses au problème de l'immigration", avait réagi de son côté le président du groupe Horizons Laurent Marcangeli, membre de la majorité.
"Beaucoup de parlementaires qui depuis des mois et des mois demandent d'avoir un débat sur l'immigration viennent de se priver du débat", a fustigé le ministre du Travail Olivier Dussopt lors d'un point presse.
Le patron de LR Eric Ciotti a lui défendu un vote de "cohérence", et appelé à ce que les débats "se poursuivent sur une base beaucoup plus crédible". "La seule boussole sera le texte du Sénat", a réagi via un communiqué le patron du groupe à la chambre haute Bruno Retailleau.
Une majorité des députés LR (40 élus) a voté pour cette motion de rejet (2 ont voté contre, 11 se sont abstenus et 9 n'ont pas pris part au vote). Dans le camp présidentiel, 5 députés Renaissance, 3 MoDem et un Horizons n'ont pas pris part à ce vote serré.
La présidente Renaissance de l'Assemblée Yaël Braun-Pivet a, elle, pris part au vote, ce qui n'est pas toujours le cas.
Des députés demandent la démission de Gérald Darmanin
À l'Assemblée, la gauche et le RN ont salué debout dans l'hémicycle l'adoption de la motion de rejet, des députés de gauche appelant à la démission du ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin.
Ce rejet est aussi un camouflet pour ce dernier, qui a fait le pari de trouver un chemin, notamment avec la droite, pour faire passer son texte à l'Assemblée.
"Ça sent le bout du chemin" pour Gérald Darmanin et pour sa loi, a jugé le leader insoumis Jean-Luc Mélenchon sur X (ex-Twitter).
"Nous avons protégé les Français d'un appel d'air migratoire", a estimé de son côté la présidente du groupe RN Marine Le Pen face aux journalistes. C'est "un désaveu extrêmement puissant", a-t-elle encore estimé.
Si le soutien de la gauche à la motion de rejet était acquis, les LR et le RN ont fait planer le suspense toute la journée.
"Votre gouvernement a laissé piétiner en commission le texte de fermeté du Sénat", a lancé au ministre le patron du groupe LR Olivier Marleix.
Au Parti socialiste, le premier secrétaire Olivier Faure a estimé que Gérald Darmanin était "désavoué" et devait en "tirer les conclusions". "C'est l'échec de Gérald Darmanin", un ministre "qui s'est fait copie des idées d'extrême droite", a aussi considéré la patronne des députés écologistes Cyrielle Chatelain.
"Nous exigeons le retrait de ce texte qui a déjà fait bien trop de mal", a déclaré à la presse la députée communiste Elsa Faucillon.
"C'était un texte médiocre et son rejet est une bonne nouvelle, même si on attend de voir ce que sera la suite", a également déclaré à l'AFP Pierre Henry, président de l'association France Fraternités.