RMC

"Expliquez-nous": qui décide (vraiment) des mesures du déconfinement en France?

Tous les jours, à 7h50 sur RMC, Nicolas Poincaré décrypte l'actualité dans "Expliquez-nous".

Il y ce que l'on sait. Et ce que l'on ne sait pas. Le déconfinement ne se fera donc pas région par région, mais dans toute la France en même temps a partir du 11 mai. Et on aura le droit de circuler d'une région à l'autre. L'Élysée l’a précisé jeudi, mettant un terme au débat animé.

Plusieurs présidents de régions moins touchées que d’autres plaidaient pour que les choses aillent plus vite chez eux. C’était le cas d’Hervé Morin, président de la Normandie, de Renaud Muselier président de la région Sud, ou encore de Carole Delga, présidente de la région Occitanie. Emmanuel Macron, lui même en Bretagne, avait évoqué des mesures plus ou moins rapides selon les secteurs ou les régions. Les étapes se passeraient plus vite là ou le virus a peu circulé.

Le risque de "deux France"

C’est aussi ce que préconisait l’Académie de médecine: dans un avis du 5 avril, l'Académie préconisait la sortie progressive par région, plutôt que par classe d'âge. Elle voulait que les régions soit déconfinées selon des critères précis: lorsque l’on constate une décroissance du nombre de patients et lorsque les services de réanimation ont retrouvé un taux d'occupation normal. Et dans ce cas-là, les habitants d’une région déconfinée n’auraient pas eu le droit de se rendre dans les régions encore confinés. Et vice versa… Système qui aurait provisoirement créer "deux France". 

Mais, finalement cela ne va pas se passer comme ça. Il pourra y avoir des adaptations secteurs par secteurs, les décisions différentes dans les zones rurales et dans les grandes villes, mais pour l’essentiel, ce sera pour tout le monde, en même temps.

L’Elysée explique que la France n’est pas Allemagne, avec ses Landers autonomes et qu’on ne peut pas demander aux douaniers d’établir des frontières entres les régions. L’Elysée a été clair: "Il faut faire en sorte qu’il n’y ait aucun problème pour se déplacer d’une région à l’autre"… Voila pour ceux qui se demandaient où ils auraient le droit d'aller cet été. 

L’Elysée a aussi donné des précisions sur la rentrée scolaire qui se fera sur la base du volontariat des parents. Aucun élève se sera obligé de rentrer à l'école avant septembre. A condition de suivre un enseignement a distance. 

Qui décide?

Pour le reste, il y a énormément de détails qui ne sont pas encore réglés: un plan sera présenté en début de semaine prochaine, puis encore détaillé avant le 11 mai.

Un homme est chargé de tout coordonner. C’est Jean Castex, le monsieur déconfinement. Il a 54 ans, c’est homme du Sud-Ouest, maire de Prades, commune des Pyrénées-Orientales. Mais c’est surtout un haut fonctionnaire: ENA, Cour des comptes, ancien directeur de cabinet du ministre de la Santé Xavier Bertrand, ancien conseiller social de Nicolas Sarkozy à l’Elysée, proche aussi de Gérald Darmanin... Bref un homme issu de la droite dite "social". Il avait failli être nommé ministre de l'Intérieur en 2018. Finalement, il était devenu délégué interministériel à la préparation des Jeux olympiques jusqu'à sa nomination au déconfinement. Il a récolté mercredi les copies de tous les ministres et a quelque jours pour en faire la synthèse et répondre à tout les questions que l’on se pose.

Car ce déconfinement apparaît de plus en plus comme un incroyable casse-tête. Si confiner, c'était facile - il a suffit de l'annoncer le 16 mars au soir, pour qu’il soit effectif le lendemain midi-, le déconfinement est beaucoup plus compliqué, beaucoup plus risqué, beaucoup plus polémique. Il y a avait un consensus pour le confinement, il n’y en pas pas pour la sortie...

Macron, seul. Contre tous?

Ce qui est clair, c’est qu’au bout du compte: c’est toujours le même qui décide. Et ce n’est pas Jean Castex, le monsieur déconfinement. Ni Jean-François Delfraissy, le président du comité scientifique, comme on a pu le croire a un moment. Non, c'est bien Emmanuel Macron qui décide tout. Et tout seul.

Quelques exemples: jeudi matin, sur RMC, Christophe Castaner, ministre de l'Intérieur dit que le 12 mai, ce ne sera pas "la liberté de circuler partout". Trois heures après, Emmanuel Macron dit que "Si, on aura le droit de circuler partout". 

Edouard Philippe avait dit: "Le déconfinement, ce ne sera pas pour tout le monde en même temps". Et bien, si ce sera tout le monde en même temps. Le 12 mars, le ministre de l’Education avait dit "pas question de fermer toutes les écoles". Le soir même, Emmanuel Macron avait annoncé la fermeture... de toutes les écoles. 

La France a un régime présidentiel, centralisateur. On a un Président qui a plus de pouvoir que Donald Trump aux Etats-Unis ou qu’Angela Merkel en Allemagne. Même en temps de crise. Surtout en temps de crise... 

Nicolas Poincaré